Pièce de théâtre

Arsenic et Eczéma

de Alain Cadéo
Broché – 10 mai 2022
Éditions : Cahiers de l’Égaré

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Lieu :
les égouts de Paris, très en profondeur.

Personnages :
Deux types avec casques et lampes, tenues d’égoutiers, bardas, sacoches, l’un arrive de la gauche, l’autre de la droite Azema, dit Eczéma. Un rêveur, un optimiste, une boule de malice et de bonne humeur. Peut-être un intello contrarié capable de s’adapter à tout. Il a une grosse tache sur le visage et une autre sur le bras. Passe son temps à se gratter et les démangeaisons s’accentuent en fonction de l’action. Bavard, sympathique, aime à susciter l’inquiétude. Père mineur en Alaska ayant abandonné sa famille. Mère prostituée. Pas d’attache.
Arsène, surnommé Arsenic par ses collègues de boulot. Très grand, voûté, l’œil clair, râleur. Le genre revenu de tout. Sens de la répartie aigre-douce. Bosseur, « pro », toujours syndicaliste mais grand déçu de la politique et des humains en général. Au fond pour lui il n’y a pas d’issue. On naît, on vit, on meurt dans un boyau. Pas de choix. « La vie est un long fleuve de merde ». Il est comme la plupart d’entre nous, incrédule, pragmatique, réaliste et pourtant il rêve d’autre chose, d’un ailleurs, différent. Marié, père de deux enfants qu’il ne voit plus, divorcé. Travaille depuis 30 ans dans les égouts. Passionné contrarié, Il se veut lucide, froid, cynique. Eczéma court dans les égouts…
On entend comme un galop à sa poursuite…
Il passe devant le 109, s’arrête un instant, le téléphone pend avec le même grésillement qu’au début de la pièce. Il finit par trouver l’échelle de sortie, grimpe, trébuche, tombe, se raccroche, continue de monter, soulève enfin la plaque d’égout donnant sur la rue, sort…
Clarté aveuglante…
Plus rien…
La ville a disparu, désintégrée.
On entend alors la voix d’Arsène qui hurle en ricanant : Pourquoi tu cours ma poule ! Je te l’ai dit, y’a plus rien là-haut…
Y’a plus rien…
Les dieux sont revenus…

 

 

Couv_039_Cadéo Alain - Arsenic et Eczéma

 

 

Il y a quelques jours, Martine Cadéo m’a envoyé un message me proposant la lecture d’une pièce de théâtre…
Tout a commencé ce jour-là.
Quelques temps plus tard, elle me prévint que le livre allait pouvoir être envoyé chez moi. Je lui transmis mon adresse pour la seconde fois. C’est à ce moment-là que j’aurai du m’en douter ! Mais je ne savais pas encore où j’allais…
C’était ma première “pièce de théâtre”.
J’avoue que ma curiosité avait été plus rapide que ma raison, compte tenu du volume de ma PAL !
Mais c’était déjà trop tard… j’avais franchi la première étape.

Dès lors, je ne pouvais plus reculer…
Je commençais donc ma lecture.

“Moi, Minotaure…
Je suis repu et fatigué de dévorer des chairs ayant la saveur douceâtre de la raison…”

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Je redécouvre donc un “Alain Cadéo” dans un tout autre registre que celui que je lui connaissais, et je dois avouer que j’ai très vite été pris au jeu, et je me suis même amusé.
Compte tenu du nombre de pages, j’ai décidé de m’isoler et de lire la pièce à haute voix !
Je peux vous assurer que si vous avez la possibilité de faire, le récit prendra un tout autre relief.

C’est une très belle joute verbale que nous propose Alain.
C’est délicieux, c’est exquis… ça fourmille d’idées à chaque dialogue.
Deux personnages “bougons” et perdus en sous-sols, dépassés par une situation hors du commun.
Je peux difficilement vous en dire plus sans trahir le récit et l’auteur. Mais le tout est rondement mené, avec un final qui ne mérite que mes applaudissements !

J’ai malgré tout trouvé un petit point négatif, et j’espère bien qu’Alain n’en prendra pas ombrage. J’eusse aimé qu’il y ait un peu plus de pages… pour étancher cette nouvelle soif !
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Voilà, c’est fait.
Je ne peux en vouloir qu’à moi-même.
Dorénavant, je réfléchirai beaucoup plus longtemps avant de donner une réponse…
Résultat…
J’ai de nouvelles envies !!!
Mais où vais-je trouver le temps de les assouvir ?

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Extraits :

« ARSENE : – Y’en a j’vous jure ! Sûrement des gros cons de gothiques ! Une saloperie de secte ! Ou une bande qui se la joue anthropophage, vampire ou loup-garou…
Bon, c’est pas tout ça, va falloir continuer le travail. Tiens, essaye de réduire le débit avec la vanne là… »

« ECZEMA : – Ben quoi ! On n’est pas peinards là, tous les deux, dans nos égouts ! Personne pour nous faire des reproches ! On travaille au rythme qu’on veut, on a ni chaud ni froid, on peut lambiner, chanter, siffler. On peut même gamberger tout à notre aise… »

« ECZEMA : – Attends, pas tout de suite… Un dernier p’tit verre… Je voulais t’dire… Juste un truc sur ma mère, un truc que j’ai jamais dit à personne… Mais ça vient là, faut qu’ça sorte… Bon ben voilà… Ma mère… c’était un cadeau. Même si y payaient les types, ça restait un cadeau… vu qu’elle était tellement mignonne… Et tu l’aurais vue rire ! Ce qui était dur pour moi en fin de compte, c’était de la partager. Et puis fallait toujours qu’elle bouge. On aurait dit un oiseau… En fait d’oiseau moi j’avais que des miettes, des p’tits bouts d’amour… Mais alors ceux là… Si tu savais… La régalade… J’en faisais des tartines, pain beurre et miel. »

« ARSENE : – Stop ! On arrête tout là ! J’ai pas envie en plus d’me prendre la voûte sur la gueule avec tout ton bordel ! C’est pas parce que Monsieur il a le rythme dans la peau qu’on va s’lâcher dans ta rave party et y passer la nuit ! Faudrait plutôt songer à retrouver l’109 ! Aventurier de mes deux ! »

 

 

Alain Cadéo est l’auteur de nombreux ouvrages (nouvelles, romans, textes, pièces de théâtre), dont « Stanislas » (1983), premier prix Marcel Pagnol 1983 ou encore Macadam Epitaphe (1986), Plume d’Or Antibes et Prix Gilbert Dupé.

Après avoir été notamment publié par Mercure de France, il est depuis 2018 publié par les Éditions La Trace.

Il vit à Évenos, en Provence.

Bibliographie
– Les Voix de Brume (1982, nouvelles)
– Stanislas (1983, roman)
– La Corne de Dieu (1983, roman)
– L’Océan vertical (1983, roman)
– Le Mangeur de Peur (1984, roman)
– Macadam Epitaphe (1986, texte)
– Le Ciel au ventre (1993, texte)
– Les Anges disparaissent (1998, roman)
– Fin (1999, texte)
– Et votre éternité sera la somme de vos rêves (2008, roman)
– L’Ombre d’un doute (2008, théâtre)
– Les Réveillés de l’ombre (2013, théâtre)
– Zoé (2013, roman)
– Chaque seconde est un murmure (2016, roman)
– Des Mots de contrebande (Aux inconnus qui comme moi…) (2018, texte)
– Comme un enfant qui joue tout seul (2019, roman)
– Mayacumbra (2019, roman)
– Lettres en Vie (2020, texte illustré)

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