de Emmanuel Robert-Espalieu
Broché – 23 février 2023
Éditions : Michel Lafon
Si votre fils était voué à un destin macabre, que feriez-vous ?
Unique héritière du bourreau de Joigny, Marguerite veut tenir la promesse faite à son père : s’assurer que son fils, Henri, perpétue la tradition familiale en devenant Monsieur de Paris, l’exécuteur le plus connu du royaume. Mais le moment venu, Henri, décidé à fuir la vie de paria qu’on veut lui imposer, s’est évaporé dans » la Vallée de la misère « , les bas-fonds des quais de Seine. Marguerite imagine alors l’impensable : officier elle-même sur l’échafaud, à l’insu de tous, le temps de retrouver son fils. Un risque immense pour une femme dans cette période sombre et tumultueuse qu’est la fin de règne de Louis XIV. D’autant plus que les amitiés douteuses d’Henri vont l’entraîner dans de bien ténébreuses affaires.
Monsieur de Paris est la suite de Fleur de sang.
Il peut se lire indépendamment, mais il est tellement intéressant dans le développement des personnages qu’il serait dommage de ne pas le lire avant…
Quel plaisir de retrouver Marguerite, fille et femme de bourreau, qui va tout faire pour que de son fils Henri, devienne le prochain bourreau de la capitale, le prochain “Monsieur de Paris”. Mais malheureusement, tout le monde n’est pas fait pour être bourreau, et malgré toutes les discutions qu’ils ont peu avoir, Henri sait très bien au fond de lui, qu’il n’est pas fait pour cette fonction-là. De plus, Henri est amoureux. Il est amoureux de la belle Madeleine, et se refuse à lui imposer une vie qu’ils n’auraient pas choisie.
Mais Madeleine, n’est pas libre. Martin la mène comme, et où il veut, et par la force si nécessaire…
Henri doit respecter la tradition familiale à n’importe quel prix, et Marguerite y veille au quotidien.
Mais un matin, Henri à disparu sans laisser aucune trace !
Commence alors pour Marguerite, une mission incroyable qu’elle met en place au fur et à mesure, dans le Paris sombre, pauvre et violent du règne du roi soleil. Prête à tout pour retrouver son fils, elle va prendre tous les risques et être embarquée dans des problèmes qui n’en finissent plus…
Jusqu’où une mère est-elle prête à aller par amour pour son fils ?
Emmanuel Robert-Espalieu, m’avait déjà complètement subjugué dans le premier volet, de cette saga historico/familiale, mais dans celui-ci, tout en conservant le style, le charme, les odeurs et la saleté, il construit son roman comme un thriller sans aucun tant mort, avec de nombreux rebondissements. J’ai été parfois même estomaqué… jusqu’à cette fin que j’ai haïe…
…Mais quelle surprise !!!
Énorme coup de cœur, pour ce récit captivant, servi par une écriture fluide et agréable.
J’avais vraiment l’impression d’y être et d’observer à chaque coins de rues, le déroulement du récit.
Deux romans qui mériteraient vraiment une adaptation cinématographique.
J’ai encore les hurlements des suppliciés dans les oreilles… Ils le méritaient !
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Extraits :
« En revanche, l’homme devenait frugal en paroles quand il travaillait.
D’ailleurs personne, même celles ou ceux qui le connaissaient, ne l’aurait abordé à ce moment-là. Car Clément, cet homme à l’allure bienveillante et affable qui continuait de fixer Henri, n’était autre que Monsieur de Paris, le bourreau de la capitale, l’exécuteur le plus connu du royaume. Un homme respectable et respecté, et ce même si la canne dont il faisait usage pour se déplacer depuis quelque temps lui fragilisait l’allure. Sa vue s’altérait de jour en jour, et bien que prétendant le contraire, il ne devinait plus que le contour des choses et devait désormais se faire suppléer pour les exécutions. »
« Marguerite n’est pas de celles qui se laissent aller au souci de l’apparence, comme cette nouvelle tendance de la petite bourgeoisie qui voudrait qu’on se pare d’une manière plus avantageuse que sa condition.
Le maquillage outrancier, les toilettes et les bijoux de celles qui jouent les grandes dames dans les jardins des Tuileries comme à la parade, en se délectant de glaces et d’huîtres, ne l’intéressent guère. Marguerite est toujours soignée, ses cheveux de jais tirés en arrière finissant en un agréable chignon suspendu par une simple broche d’argent au-dessus de sa nuque duveteuse incurvée par son port élégant. Sa mise est sobre. Elle est le plus souvent vêtue de sa robe en laine brun foncé doublée de popeline, légère et bon marché, et surtout facile à porter, cintrée à la taille d’un ruban de soie noire ou rouille qui souligne sa silhouette sur laquelle le temps ne semble pas avoir de prise. »
« – Robe noire ! cria soudainement Atedjaka, qui contenait mal sa colère, arrachant le papier des mains d’Henri.
– Mais qu’est-ce qu’il te prend ? lui fit celui-ci, atterré.
– Lui ! continua-t-il, la voix sourde, montrant du doigt l’homme d’Église sur le dessin. Assassin!
– Un prêtre ? Mais comment ? »
« “Bourreau !” “Fils de bourreau !” “Coupeur de têtes !”
Pourtant il le savait, il l’avait toujours su. Déjà petit on lui avait appris à taire son nom, à user de détours pour rentrer à la maison du pilori sans être vu. Il savait pertinemment ce que faisait son oncle, qui il était. Il en était même secrètement un peu fier, tout môme qu’il était. Tout comme il était fier de sa mère qui faisait du bien aux pauvres dans l’ombre de son échoppe, et qui était aimée pour cela. Il savait aussi ce qui l’attendait. Comme on sait que quelque chose va arriver, inéluctable, mais dans un futur assez lointain pour le percevoir hors de soi, presque improbable, repoussé par l’illusion d’une vie qu’on s’est fabriquée pour paraître normal aux yeux du monde. Un futur de plus en plus proche avec le temps, où il devrait embrasser une voie sur laquelle il marchait déjà, mais en regardant ailleurs. Il n’était qu’un enfant. Et un enfant ne pense pas à ces choses-là. Un enfant ça joue, ça court, sa chaparde et ça crie quand il est poursuivi. Un enfant ça rêve, sa apprend avec ses mains, ses yeux, son corps. »
Emmanuel Robert-Espalieu est né le 1er juillet 1970 à Suresnes dans les Hauts-de-Seine. Après une carrière comme photographe, dans les coulisses des théâtres (Festival d’Avignon, Théâtre National de la Colline, Comédie Français…), dramaturge et réalisateur, il se consacre désormais à l’écriture et la mise en scène de pièces de théâtre, ainsi qu’à l’écriture de romans.
Fleur de sang est son premier roman.
https://leressentidejeanpaul.com/2023/12/29/fleur-de-sang/
Monsieur de Paris son second.
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