de Soleyne Joubert
Broché – 7 mars 2024
Éditions : M PLUS
Cette histoire commence au creux de la femme. Là où naît la vie. Esther et Pierre attendent un enfant comme on attend la pluie, de façon enfantine et naïve. Pourtant, le jour de la naissance, Pierre disparaît, laissant Esther seule avec ce bébé qu’elle ne reconnaît pas.
Ce roman d’une douce colère est une histoire de passage. De ce moment suspendu où la jeune femme devient mère et fait du même coup l’expérience de la vie et de la mort. C’est aussi un hymne au lien qui se tisse entre les femmes d’une lignée. À cette toile d’amour charnel qu’ont tissée nos ancêtres et dans laquelle la jeune mère s’entortille pour ne plus jamais tomber.
Ce roman d’une douce colère est un hymne au lien qui se tisse entre les femmes d’une lignée.
Et encore un premier roman !
Un roman très bien écrit, dans le style et dans le rythme, mais ce sont surtout les émotions qui m’ont emporté… D’ailleurs au début, je n’ai pas toujours compris l’attitude de cette maman, c’est vrai, c’est ce qui m’a d’autant plus intéressé. Essayer de comprendre, essayer de vivre ce moment tellement difficile qu’est la dépression post partum…
Esther et Pierre forment un couple lié par l’amour. Ils vivent dans un pays où la couleur est reine, le Burkina Faso. Ils travaillent pour une ONG.
Dès le premier chapitre, on apprend qu’Esther est enceinte, mais la guerre éclate alors que la naissance du bébé est toute proche. Pierre décide qu’ils doivent quitter leur beau pays pour Paris. Il a quelques affaires encore à régler sur place et il la rejoindra dès que possible. Elle doit s’organiser, faire ses valises et contacte sa meilleure amie, Aude qui vit avec Xavier le frère d’Esther à Paris.
Quelques jours après son arrivée, elle sent les premières contractions. Elle n’est pas prête, c’est trop tôt d’autant plus que Pierre n’est toujours pas arrivé. Elle n’arrive toujours pas à joindre l’élu de son cœur. La vie d’Esther bascule complètement à ce moment-là, lorsqu’elle se retrouve seule avec son bébé, elle se sent perdue.
Le récit m’a pris aux tripes, et je pense qu’il résonnera dans l’esprit de nombreuses femmes.
Esther a eu une enfance très difficile, et aujourd’hui est est une mère sans père. Comment va-t-elle tenir rôle de maman sans l’homme avec lequel elle s’était construite. Elle a beau s’accrocher, essayer de tenir, elle ne peut pas, elle est complément perdue. J’ai essayé de ma mettre à sa place, comment aurais-je appréhendé ce qu’elle vivait ? Soleyne Joubert nous montre la colère de cette femme qui se retrouve seule devenue mère sans aucune expérience. Heureusement, Aude est là, et en tant que femme et amie, elle fera son possible pour lui redonner confiance…
Chaque femme a une histoire, avec des drames et des secrets. J’ai eu l’impression que Soleyne nous racontait peut-être son vécu avec émotion et en toute simplicité, la peur, la colère, la force et le courage nécessaire à toutes les mamans qui a un moment ont vécu ce moment où tout devient fragile, les liens familiaux, le travail, la présence d’un bébé, et même la vie… Des moments très fort où les femmes doivent lutter constamment contre la dépression qui les guette au plus profond de leur être…
Coup de cœur pour ce récit qui me rappelle qu’il ne doit pas toujours être facile de devenir maman…
Un livre que je vous recommande vivement.
Un grand merci à M+ éditions pour cette très belle surprise.
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Extraits :
« En se couchant dans le lit métallique, elle reconnut immédiatement la texture des draps. Épais et raides, avec des coutures aux ourlets qui grattent quand elles vous frôlent. Son bébé était de retour dans le lit boîte de sa naissance. Elle roula sur le côté pour le regarder, pour imprégner et saturer ses rétines de lui. Elle ferma et rouvrit plusieurs fois les paupières. Photos mentales.
Quand elle se réveillerait demain, il serait peut-être parti pour de bon et le lit boîte serait vide. Pour toujours. Les choses auraient-elles été différentes si elle avait su ? »
« Aude sortit de son sac des accessoires qu’elle avait utilisés pour ses propres accouchements. Un coussin d’allaitement, un sifflet dans lequel souffler pour mieux pousser, un baume à lèvres, des chaussettes, une enceinte de musique, des flacons d’huile essentielle, un spray pour le visage. »
« – Bois ça ! conseilla-t-il.
Elle s’exécuta et s’essuya le visage sur les manches de sa chemise. Ses cheveux attachés en une longue natte étaient durcis de poussière orange.
– Est-ce que c’est toujours aussi dur ? demanda-t-elle.
Il réfléchit un instant en se grattant le crâne.
– Je ne suis pas sûr de ce que je veux te répondre. Tu veux le discours rassurant ou réaliste ? »
« Quand elle n’eut plus rien à pleurer, il faisait nuit. Grand-Mère se leva et vint l’entourer de ses bras. La chaleur de son corps la réchauffa et elle s’apaisa enfin. Elle parla d’une voix grave et solennelle.
– La vie d’une femme est semée de chagrins insupportables, de souffrances qui nous poussent à commettre des actes impardonnables et fous. C’est notre fragilité de tellement aimer. Mais c’est aussi ce qui fait notre puissance. L’amour d’une femme, d’une mère, d’une sœur, relève du sacré. »
Soleyne Joubert est née en 1989 à Paris.
Elle nous dévoile dans ce premier roman, un univers doux et violent, dans lequel résonnent sa propre maternité, son engagement féministe et ses dix ans d’expatriation.
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