de Haruki Murakami
Poche – 18 février 2010
Éditeur : 10 X 18

Une femme endormie sous l’emprise de saules aveugles. Un fantôme surpris par un gardien de nuit. Un écrivain possédé par le personnage qu’il vient de créer. Sur le fil secret qui enlace le rêve à la réalité, les êtres de Murakami passent en funambules d’une nouvelle à l’autre, et nous emportent avec fièvre dans les abîmes hypnotiques de notre conscience.
“Haruki Murakami confirme sa stature de géant nippon des lettres. […]
Ce recueil est un labyrinthe familier, un palais des glaces,
où le lecteur peut se perdre, et se reconnaître, avec délices.”
David Fontaine, Le Canard enchaîné
Traduit du japonais par Hélène Morita.

Un très agréable recueil de nouvelles…
À la fin de ma lecture, je me suis vraiment interrogé sur la manière dont je pourrais vous parler de ce recueil de nouvelles et surtout sur la façon dont je pourrais vous donner envie de le lire.
Commençons donc par le commencement…
Connaissez-vous Haruki Murakami ?
En septembre 2023, j’ai fait la découverte de l’excellent livre Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, qui m’a plongé dans un livre très enrichissant en philosophie de la vie basée sur l’effort, la volonté et la persévérance, mettant en lumière l’infini potentiel humain… Et comme il le souligne si bien, “le seul adversaire que l’on doit vaincre, c’est soi”.
Dans le livre « Saules aveugles, femme endormie », le narrateur nous plonge dans une sorte de solitude à travers 23 récits aussi variés que les personnages rencontrés au fil de ma lecture, mais toujours avec cette solitude. Toujours empreint de poésie, l’écrivain vous conduira dans son monde, oscillant entre la réalité et l’imaginaire. Haruki m’a interpelé par la musicalité de ses phrases, m’a envoûté en pénétrant régulièrement au plus profond de mon esprit grâce à de petits détails, par-ci par-là, un visage, un sourire, un regard qui brille, un verre de vin, une vague qui apparait au loin et qui roule sur le sable fin… Haruki est un excellent conteur, un grand observateur qui analyse et transmet de quoi ravir les adeptes de belles histoires variées, à l’écriture fine et délicate qui ne pourront vous laisser indifférents…
Prendre du temps et du plaisir…
Votre imaginaire fera le reste. Après tout, ne sommes-nous pas les héros de nos lectures ?
Haruki en est conscient et nous fait rêver…
Un grand bravo à Hélène Morita, traductrice qui a réussi à saisir et à exprimer toutes les émotions de l’écrivain !
Extraits :
« “— Tiens, voilà qui ferait un beau slogan !”
Les pare-chocs sont faits pour être cabossés.
J’observai sa bouche tandis qu’elle prononçait cette phrase.
“Ce que je voulais dire, reprit-elle doucement en grattant le lobe de son oreille – un lobe à la très jolie forme -, c’est que, quoi qu’on puisque souhaiter, aussi loin qu’on puisse aller, on reste ce que l’on est, voilà tout.
— Comme slogan, ça aussi, c’est pas mal !”
Quoi qu’on puisse souhaiter, aussi loin qu’on puisse aller, on reste ce que l’on est, voilà tout. »
« “— Tu regardes souvent la télévision ?”
Je secouai la tête. “Je n’ai pas de télé.
— Pourtant, reprit-il après un temps de réflexion, il y a au moins une très bonne chose avec la télévision.
Tu peux l’éteindre quand tu en as envie. Et personne ne se plaint.”
Il appuya sur le “off” de la télécommande. L’image disparut à la seconde. La pièce redevint silencieuse et paisible. Au-delà des fenêtres, des lumières commencèrent à briller.
Pendant environ cinq minutes, nous n’échangeâmes pas un mot, nous contentant de déguster nos whiskies. »
« Il me dit qu’il avait lu tous mes romans. “Nous avons des façons de penser tout à fait différentes, toi et moi, expliqua-t-il, et je crois aussi que nos buts sont différents. Mais j’estime que c’est magnifique de pouvoir raconter des histoires aux autres.”
Opinion parfaitement respectable. “À condition de savoir bien les raconter”, lui avais-je répondu. »
« “Je fais parfois ce rêve”, dit le jeune homme dans son fauteuil roulant. Sa voix était chargée d’étranges échos, comme si elle sortait d’une fosse profonde. “Il y a un couteau planté de travers dans la partie souple de ma tête, là où résident les souvenirs. Il est enfoncé profondément à l’intérieur. Cela ne me fait pas spécialement mal. Je n’en sens pas le poids non plus. Simplement, il est là, planté dans ma tête. Je me tiens à part, et j’observe la scène comme s’il s’agissait de quelqu’un d’autre. J’aimerais que quelqu’un retire ce couteau. Mais personne ne sait que j’ai un couteau fiché dans le cerveau.” »
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Haruki Murakami, né à Kyoto en 1949 et élevé à Kōbe, a étudié le théâtre et le cinéma à l’université Waseda, avant d’ouvrir un club de jazz à Tokyo en 1974.
Son premier roman, Écoute le chant du vent (1979), un titre emprunté à Truman Capote, lui a valu le prix Gunzo et un succès immédiat au Japon. Suivront : La Course au mouton sauvage, La Fin des temps, La Ballade de l’impossible, Danse, danse, danse et L’éléphant s’évapore.
Exilé en Grèce en 1988, en Italie puis aux États-Unis, où il écrit ses Chroniques de l’oiseau à ressort et Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil, il rentre au Japon en 1995, écrit un recueil de nouvelles sur le séisme de Kōbe, Après le tremblement de terre, une enquête sur l’attentat de la secte Aum, Underground, puis suivent Les Amants du Spoutnik, le superbe Kafka sur le rivage et 1Q84 (livres 1,2 et 3). Plusieurs fois favori pour le Nobel de littérature, Haruki Murakami a reçu le prestigieux Yomiuri Prize et le prix Kafka 2006. Après L’Incolore Tsukuru Tazaki et ses années de pèlerinage, il autorise la publication d’Écoute le chant du vent suivi de Flipper, 1973, ses deux premiers romans inédits. Le Meurtre du Commandeur (livres 1 et 2) est son dernier roman paru.
– Autoportrait de l’auteur en coureur de fond
https://leressentidejeanpaul.com/2023/09/22/autoportrait-de-lauteur-en-coureur-de-fond/


