de Delphine Bertholon
Broché – 17 mars 2021
Éditions : Flammarion
Début des années 1990, dans le sud de la France. Lettie, quatorze ans, vit avec sa mère dans un mobile home et brûle secrètement d’être quelqu’un d’autre. Quand survient Dahlia, une fille un peu étrange, une ardente amitié se noue entre ces adolescentes que tout semble opposer. Dahlia a deux jeunes frères, des parents généreux, et Lettie voit dans le père de son amie l’homme idéal, celui qui lui a toujours manqué. Chacune envie l’autre ; qui sa tranquillité, qui sa famille joyeuse. Mais le jour où Dahlia lui confie un secret inavouable, Lettie ne parvient pas à le garder. La famille de son amie vole en éclats. Au milieu du chaos, le doute : et si Dahlia avait menti ?
Delphine Bertholon explore le lien ambigu entre adolescence et vérité, et les frontières floues qui nous séparent du passé.
Un roman touchant et captivant avec beaucoup de finesse envers toute une adolescente qui cherche sa place.
L’adolescence est pour moi la période la plus compliquée de notre vie, tout est possible.
Le pire comme le meilleur…
Delphine Bertholon nous propose avec “Dahlia”, une histoire qui m’a fait me poser pas mal de question !
Delphine bouscule et égratigne la notion de “la famille” qui est malmenée pendant tout ce roman.
Nous sommes dans les années 90. Entre Dahlia et Lettie, qui ont 14 ans, naît une amitié toute en fragilité. De conditions très différentes, elles apprennent petit à petit à se connaître.
Dahlia vit chez ses parents avec ses deux petits frères qui sont jumeaux, avec qui elle partage sa chambre. Sa maman ne travaille pas, son père est chauffeur routier.
Lettie vit avec sa mère dans un mobile-home, elle travaille dans les services sociaux. Elle n’a pas de papa. Elle ne l’a jamais vu, elle ne sait rien de lui. Sujet tabou pour la maman…
Dahlia étouffe dans un univers clos alors que Lettie représente une certaine liberté et a les faveurs des élèves de la classe.
Un jour Dahlia raconte un secret très important à Lettie, “son secret”, en lui faisait jurer de ne jamais le raconter à qui que ce soit… Mais ce secret va peser sur la conscience de Lettie qui ne tiendra pas. Elle finira par en parler à sa mère, qui se fera un devoir elle-même de le raconter à qui de droit, déclenchant ainsi un processus judiciaire ! Dès lors, une machine infernale démarre au grand désespoir de Dahlia…
Cette amitié naissante entre les deux jeunes filles, dès lors va s’écrouler et la famille de Dahlia va littéralement voler en éclats…
Delphine Bertholon interroge sur toutes les difficultés vécues par une adolescente qui arrive dans un nouvel environnement, nouvelle classe, constituée d’amitiés fragiles, de mensonges et de jalousies. Elle doit trouver sa place, mais tous les cercles d’amitiés sont déjà définis.
Dahlia, a du mal à s’intégrer et lorsque Nettie la remarque enfin, il faut absolument qu’elle arrive à la captiver, elle doit se faire remarquer…
Le sujet est bien mené, intéressant, mais pas suffisamment “fort” pour moi.
Je ne voudrai rien dévoiler à ceux qui ne l’ont pas encore lu, mais je pense que les réactions des divers personnages ne sont pas à la mesure de tous les préjudices vécus.
Par contre la fin du roman, les retrouvailles entre Dahlia et Nettie adultes, m’ont parus très intéressantes d’un point de vue psychologique.
Mon Ressenti reste un avis personnel, et cela ne m’empêchera pas de lire un autre roman de Delphine lorsque l’occasion se représentera.
C’est une belle histoire, avec beaucoup de sensibilité et la construction de l’écriture est plutôt agréable.
J’ai passé un bon moment, mais… Il m’a manqué un petit quelque chose !
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Extraits :
« La première fois que je m’aperçus de l’existence de Dahlia, c’était au début de mon année de troisième, au retour des vacances de la Toussaint. Je venais d’avoir quatorze ans le 2 novembre. Je suis née le jour des Morts et c’était l’une des choses que ma mère aimait répéter, par jeu ; devenu adulte, je le répète à mon tour. J’ai fini par aimer, je crois, cette façon d’oxymore, comme si cela me donnait une touche d’originalité. Dahlia était dans ma classe depuis la rentrée, mais je ne l’avais pas remarquée jusqu’alors. Elle était encore ce que je fus longtemps : une invisible. »
« Le soir tombe derrière les vitres étincelantes. Le ciel est gris et rosissant par-delà les toits en zinc, les antennes râteaux, l’ocre minérale des tubes de cheminée. À la radio, les millionnaires promettent des fortunes pour reconstruire Notre-Dame, tandis que le périmètre est pollué au plomb, ce que le grand public apprendra plus tard – trop tard, comme souvent. »
« Je n’ai jamais compris pourquoi Annie, qui avait enfanté à dix-huit ans, était pudique et ce point. Les essayages de maillots, c’était comme les scènes coquines dans les films. La sexualité, je crois, lui faisait peur. Elle m’a transmis une partie de cette peur, de manière nébuleuse. Toute ma vie de jeune fille, puis de femme, j’ai alterné par des phases entre deux extrêmes : la putain et la nonne. Deux catégories qui, sauf miracle, enfantent rarement et ne se marient jamais. Mina est un miracle engendré par une putain de nonne, mais, par chance, son père est coureur de jupons, dragueur invétéré gentleman à ses heures, ce qui devrait offrir à cette enfant un certain équilibre, précaire peut-être, mais qu’importe. »
« Lettie,
Il fallait que la colère descende. Elle est toujours là, mais j’avais besoin de te raconter ce qui m’arrive. Après ce dimanche, j’ai essayé de te téléphoner toute la semaine, mais tu n’étais jamais là, ou tu faisais semblant, ce qui est probable (et parfaitement dégueulasse). Si j’avais pu te parler, tout serait différent…
Tu avais promis. Je croyais que tu étais mon amie, que ta parole valait quelque chose. Mais rien ne vaut, jamais, je m’en rends compte. IL n’y a que dans les romans que les amitiés sont vraies.
Tu me dégoûtes, Lettie
Comment as-tu pu répéter ÇA ? »
Delphine Bertholon naît à Lyon et écrit depuis l’âge de six ans, âge auquel elle remporte un modeste concours de poésie. Après des études de lettres, elle se destine au professorat, mais y renonce pour se consacrer à l’écriture. Dans la vingtaine, elle commence à publier ses premiers romans, la plupart publiés aux éditions Jean-Claude Lattès, tel que “Twist, journal d’une jeune fille kidnappée”. Elle écrit également des scénarios pour la télévision, comme “Yes We Can”, afin de vivre plus confortablement de sa plume.
En juillet 2018, elle signe une tribune dans ActuaLitté où elle revient sur son parcours afin de témoigner de la précarité de sa vie d’écrivaine. Elle est attirée par les romans de Stephen King. Elle se joint ainsi au mouvement de contestation sociale #PayeTonAuteur et #AuteursEnColere et aux revendications de la Ligue des auteurs professionnels.
Elle est notamment l’auteure du très remarqué “Grâce” et, plus récemment, de “Coeur-Naufrage”.