Émotion, Drame, Histoire vraie

Danse Néomaye, danse !

de Corine Valade
Broché – 16 février 2023
Éditions : de Borée

• Bandeau_Intro - 1.jpg

Le 6 juin 44, des centaines d’Afro-américains débarquent sur les plages de Normandie. Willie est un de ces hommes. De Berlin à La Rochelle puis au camp américain d’Aigrefeuille d’Aunis, il découvre des villes exsangues où tout est à reconstruire. Pianiste hors pair, la musique est son refuge. Maurice est Creusois. Maquisard, il est enrôlé au 78e Régiment d’infanterie. En 1945, il quitte sa région pour libérer le dernier bastion Allemand de La Rochelle. C’est avec soulagement qu’il laisse derrière lui la ferme familiale. Rochelaise, Néomaye est sage-femme. Prise au piège dans la poche de Royan en 1945, elle est une des rares survivantes du bombardement allié. De retour à la Rochelle, elle semble avoir perdu pied et tous l’appellent « La Tabayot », la folle. L’arrivée massive de milliers d’Américains sur le port de La Pallice va bousculer son mode de vie tout comme celui des Charentais

 

• Couv_2023-021_Valade Corine - Danse Néomaye, danse

 

Quel roman “magnifique” !

C’est le premier mot qui me vient à l’esprit en fermant, très ému, ce superbe roman…
Le chassé-croisé de trois destins, sous l’influence de l’American way of life.

Avant de commencer son roman Corine Valade nous donne le ton.
Une sélection musicale enivrante qui m’a accompagné durant toute ma lecture et plus encore !
J’ai littéralement dévoré la plus grosse partie de son roman en une soirée que j’ai terminé le lendemain à l’heure du repas. C’est le premier roman de Corine que je lis et maintenant, j’ai envie de lire tout ce qu’elle a écrit avant. C’est vivant, c’est rythmé, elle transmet énormément d’émotion en donnant littéralement vie à ses personnages. J’avais l’impression d’être là avec eux. C’est très visuel.

C’est un roman qui aborde énormément de sujets.
La seconde Guerre mondiale, en Normandie lors du débarquement, l’armée Américaine qui “s’installe” dans la région pendant près de dix ans, les Afro-Américains rejetés par leur propre peuple et accueillis en arrivant en France, la place des femmes pendant cette période, la résistance, la musique, omniprésente durant tout le récit, Jazz, Blues, Be-bop et début du rock, il y a Maurice qui étouffe dans sa famille, et qui va faire front contre les allemands, Néomaye, sage-femme qui a vécu les bombardements sur la ville de Royan et qui depuis à un regard différent sur la vie, et puis il y a Willie, afro-américain et surtout un pianiste incroyable qui malgré toutes ses souffrances va rythmer sa vie grâce à la musique l’un de ses seuls refuges…

Plus qu’un roman, c’est une véritable épopée.
C’est puissant, c’est érudit, c’est triste et violent, c’est beau et rempli d’amour. C’est un coup-de-poing littéraire et un gros coup de cœur pour moi… Et dire que j’aurai pu passer à côté de ce bijou !
Corine a donné vie à des personnages qui m’ont touché, qui m’ont ému au point d’avoir eu, vers la fin du récit des larmes de joie que je n’ai pu retenir.

Elle nous offre aussi une synthèse très intéressante de la société américaine de cette époque. Martin Luther-King, Malcolm X, Les Kennedy et bien d’autres… C’est une vraie conteuse, elle fait vivre et aimer ses personnages. Le récit est fluide et agréable, les chapitres rythment un récit fort bien documenté, j’aurais aimé qu’il y ai plus de pages encore pour ne pas, tous, les quitter aussi vite…

Un superbe portrait de “héros”, entrelacé entre la “petite” et la grande Histoire.
Alors, je me répète peut-être, mais, voilà un roman magnifique que je recommande à tous !

÷÷÷÷÷÷÷
Extraits :

« En avril 1944, les femmes sont devenues électrices et éligibles, dans les mêmes conditions que les hommes. Pour Néomaye, les futures élues, ouvriront la voie du changement, et feront évoluer le statut de l’enfant, encore considéré comme un être inachevé. La suprématie du sexe fort a assez duré, affirme-t-elle souvent à sa mère qui se gausse :
– Ben, voyons ! Et un jour, les hommes exerceront en tant que sages-femmes ! Ma fille, garde les pieds sur terre. Sinon, tu risques de perdre des clientes. Toutes ne sont pas prêtes à écouter ce genre de discours. »

« Willie ouvre délicatement le couvercle du clavier. Il ajuste son siège. Ses doigts longs et fins se promènent sur les touches soyeuses. Progressivement, elles retrouvent le chemin des notes et des mélodies. La tristesse de quitter Bessie, mêlée à l’espoir de la retrouver à New York pour Noël, donne un sens particulier à son improvisation. La musique sacrée se teinte de blues et de jazz. Edward et Elisa sentent poindre un nouveau style à la fois sauvage et contrasté. »

« Sur un simple geste de la main, Heinrich salue son chauffeur en le provoquant :
– Vous, les noirs, vous ne pouvez pas lutter contre la primauté avérée de la race blanche. Vous êtes et vous resterez inférieurs parce que c’est inscrit dans vos gènes.
Puis il claque la porte. »

« Bessie tient sa promesse. Une fois l’an, elle poste des nouvelles de Sydney Jr à Willie. À neuf ans, le garçon est dissipé. Ses résultats scolaires sont moyens, car il préfère passer du temps sur sa guitare plutôt qu’étudier. Il a le rythme dans la peau et joue déjà comme un dieu, selon son grand-père maternel ! La musique et son refuge. Il a de qui tenir ajoute-t-elle. Sur une photo jointe au courrier, le gamin fixe l’objectif. Happé par le regard de l’enfant, Willie frissonne. Sydney semble lui reprocher son absence alors qu’ils ne se connaissent pas. »

« Ne devrions-nous pas œuvrer collectivement afin de faire reconnaître nos droits et faire régner la justice et la paix ?
J’insiste, car je suis certain que vivre ensemble est possible. »

 

 

Corine Valade est originaire de la Creuse. Elle vit actuellement en Seine et Marne.
Maire-adjoint de village, présidente d’une association culturelle, elle anime un café littéraire et organise un festival annuel autour du théâtre et de la lecture.
Elle sillonne également les écoles et centres de loisirs avec un théâtre de marionnettes pour enfants.
Mais l’écriture est sa grande passion : de son propre aveu, quand elle prend sa plume, elle oublie tout et le monde peut bien s’écrouler !

Dans des romans, elle mêle avec dextérité fiction et éléments historiques.

“Ses roman offrent une réflexion certaine sur la condition féminine et les moments forts qui ont marqués les hommes…”

Émotion, Drame

Des diables et des saints

de Jean-baptiste Andrea
Broché – 14 janvier 2021
Éditeur : Iconoclaste

Bandeau_Intro.jpg

Qui prête attention à Joe ? Ses doigts agiles courent sur le clavier des pianos publics dans les gares. Il joue divinement Beethoven. Les voyageurs passent. Lui reste.
Il attend quelqu’un, qui descendra d’un train, un jour peut-être.
C’est une longue histoire. Elle a commencé il y a cinquante ans dans un orphelinat lugubre.
On y croise des diables et des saints.
Et une rose.

 

2021_064_Andrea Jean-Baptiste - Des diables et des saints

 

Joe, un vieux monsieur, pianiste talentueux, ne joue que sur des pianos dans des lieux publics, les gares et les aéroports…
C’est un véritable virtuose. Il joue pour les voyageurs, pour tous les voyageurs.
Ceux qui sont pressés qui ne l’entendent pas, ceux qui ralentissent et le voient soudain, ceux qui se figent ébahis l’oreille tendue…
Mais pourquoi s’applique-t-il à jouer ainsi, inlassablement, tous les jours sans relâche dans ces lieux de passages ?

Enfant, il avait appris le piano avec le meilleur des professeurs, mais la vie lui a très vite joué un sale tour. En 1969, suite à un accident, où il perd ses parents et sa sœur, Joe alors orphelin, se retrouve dans un orphelinat lugubre perdu dans les montagnes des Pyrénées, nommé “Les confins”, qui très vite lui fera penser à une prison. Il y fera la connaissance d’adolescents comme lui qui vont le marquer à vie dans sa tête et dans son cœur. La Fouine, Sinatra, Sousix et bien d’autres. Mais aussi Rose, la fille d’un bienfaiteur, aussi belle que méchante.

C’est avec beaucoup d’émotions, de justesse et de sensibilité que Jean-Baptiste Andrea nous raconte l’enfance de cet enfant “perdu”.
Un roman au thème sombre, mais tellement lumineux par son traitement, sa musicalité, sa tendresse et son humour. Le récit ne tombe jamais dans la noirceur.

Le séjour de Joe dans ces lieux, les rencontres qu’il y a faites, bonnes ou mauvaises, marqueront à jamais l’homme qu’il deviendra plus tard.
À travers ce récit poignant la musique résonne autant que la vie. Ce roman touchant, dès les premières notes, dès les premières mots, est aussi une histoire très émouvante…

Je me suis demandé au départ où l’histoire allait me mener.
Puis, petit à petit une structure s’est mise en place, puis finalement s’est accélérée jusqu’à ce que je ne puisse plus lâcher “Mon” roman.
Serez-vous touché vous-même, par ce roman d’aventures, d’amitié et d’amour aussi ?
En tous cas, pendant ma lecture, j’ai parfois retrouvé mon âme d’enfant…

Très bon moment de lecture !

÷÷÷÷÷÷÷

Extraits :

« Vous me connaissez. Un petit effort, souvenez-vous. Le vieux qui joue sur ces pianos publics, dans tous les lieux de passage. Le lundi je fais Orly, le vendredi, Roissy. Le reste de la semaine, les gares, d’autres aéroports, n’importe où, tant qu’il y a des pianos. On me trouve souvent gare de Lyon, j’habite tout près. Vous m’avez entendu plus d’une fois.
Un jour, enfin, vous m’approchez. Si vous êtes un homme, vous ne dites rien. Vous faites semblant de nouer votre lacet, pour m’écouter un peu sans en avoir l’air. Si vous êtes une femme, je sursaute. C’est que j’en attends une, justement. Ce n’est pas vous, ne vous vexez pas. Je l’attends depuis cinquante ans. »
…/…
« J’ai vu mes parents se disperser. Ma sœur flamber, rendre aux étoiles les atomes qu’elle avait empruntés pour devenir elle, Inès, pendant que je rester entier. Des dieux qui bénissent, des “un-seul-Dieu-créateur-du-ciel-et-de-la-terre”, des résurrections de la chair, des fils assis à la droite du père, des litanies des saints, j’en ai eu ma part, et plus que ça. La seule droite du père que je connaisse et celle que nous avons reçue, mes amis et moi, en pleine poire. J’ai vu mille hommes brisés par une vie en noir et blanc. Et des bonimenteurs leur promettre, au marché du dimanche, que s’ils y croyaient très fort et ne posaient pas trop de questions, un jour, ils auraient la couleur.
Mais quand Théas souffla : « Dieu te bénit », j’y cru pour l’unique fois de ma vie, parce que contrairement aux autres, il croyait aussi. »

 

 

Jean-Baptiste Andrea est un réalisateur, scénariste et écrivain français.

Il grandit à Cannes, où il est élève de l’Institut Stanislas et fait ses premières expériences de scène, d’écriture et de réalisation. Il est diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris et de l’ESCP-Europe.

Il écrit ses premiers films en anglais. Il a écrit et réalisé « Dead End » (2003), coréalisé avec Fabrice Canepa, qui a obtenu plusieurs prix, « Big Nothing » (2006) avec David Schwimmer et Simon Pegg, et « La Confrérie des larmes » (2013), avec Jérémie Renier et Audrey Fleurot.

Son premier roman publié en 2017, intitulé « Ma Reine », remporte plusieurs prix dont le Prix Femina des lycéens 2017, le Prix du premier roman de la La Forêt des livres 2017, le Prix « Envoyé par La Poste » 2017 ou encore le Prix Alain-Fournier 2018.

Après « Cent millions d’années et un jour » (2019), il publie son troisième roman, en 2021, « Des diables et des saints », pour lequel il obtient le Grand Prix RTL-Lire Magazine Littéraire 2021 et le prix Ouest-France Étonnants voyageurs.