Amour, Émotion, Drame, Humour, Poésie, Roman

Requiem pour une apache

de Gilles Marchand
Poche – 14 janvier 2022
Éditions : Points

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Jésus tient une petite pension, un refuge pour les réprouvés de la société. Un couple d’anciens taulards qui n’a de cesse de ruminer ses exploits. Un ancien catcheur qui n’a plus toute sa tête. Un jeune homme simplet. Une VRP qui pense que les encyclopédies sauveront le monde et un chanteur qui a glissé sur la voie savonneuse de la ringardisation. Lorsque Jolene s’y installe à son tour, plus question de baisser la tête, la pension devient le centre de l’attention et le quartier général d’une révolte poétique.

« Ce roman, c’est La vie mode d’emploi de Perec réorchestré
par A day in the life des Beatles. Ce roman,
c’est Despentes filmé par Fellini. »

Antoine Jarrige, librairie Le Tumulte

 

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Ils vivaient en paix, soit, avec leurs difficultés, mais ils vivaient en paix…
Il aura fallu, un “petit grain de sable”, un “Releveur” de gaz qui refuse de dire bonjour et tout à commencé à ce moment-là !

Si vous connaissez déjà Gilles Marchand, alors vous connaissez sa poésie entre les mots.
Si vous connaissez déjà Gilles Marchand, alors vous que vous allez découvrir des personnages extrêmement attachants.
Si vous connaissez déjà Gilles Marchand, alors vous savez que vous allez sourire parfois, trouver son texte intéressant, toujours, voire un peu fou, un peu fantastique.
Si vous connaissez déjà Gilles Marchand, alors vous vous attendez forcément à prendre beaucoup de plaisir à cette nouvelle lecture.

Et bien, vous êtes au bon endroit, vous ne vous êtes pas trompé.
On y va ?

Bienvenue dans cette grande fable poétique, politique et aussi dramatique, même si Gilles a le don de nous faire sourire entre les lignes.
Jésus tient une petite pension, où il reçoit de drôles d’individus. Les cassés de la vie, les fragiles, les pas beaux, les laids aussi, un chanteur oublié, un catcheur qu’on a trop frappé, des gens en colère, d’autres qui sourient tout le temps. Jésus ne fait pas ça pour l’argent. Il s’est donné une mission. Aider. Même si Mario, le “chef” de la cuisine, se met à penser, au bout d’un moment, que cela commence à faire beaucoup de monde tout ça !
Et puis un jour… Jolene arrive silencieuse, intriguée. Alors qu’elle-même peine à s’éveiller dans un monde qu’elle ne comprend décidément plus, elle va transformer le “refuge” en un symbole de liberté !

Voilà, vous savez tout… Ou presque !
Bah oui !
Il en faudra quand même un peu plus pour partager la vie de cette “bande d’ignorés” et verser quelques larmes… mais c’est tellement beau !

Dans un style qui me ravit à chaque fois, un doux moment de lecture où la musique est omniprésente…

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Extraits :

« Il aurait fallu commencer par le début, mais le début, on l’a oublié. Ça a démarré bien avant nous. Et bien avant elle.
Rome ne s’est pas faite en un jour, la légende de Jolene non plus. On la présente aujourd’hui comme la meneuse d’une troupe d’insurgés. Plutôt que d’insurgés, ça tenait davantage d’une cour des Miracles contemporaine accueillant les trop maigres, les trop gros, les trop petits ou trop grands, les trop ceci ou trop cela, les roux, les Arabes, les Noirs et les Chinois. »

« Jolene s’est retournée et lui a fait signe d’arrêter.
Elle a fait un nouveau pas.
Elle s’est plantée à un mètre de monsieur Gaz, a posé son verre sur le comptoir et lui a expliqué qu’ici, on disait bonjour. Tous les jours, on disait bonjour. Que l’on soit patron, employé, client ou représentant, on disait bonjour. C’était une règle un peu vieillotte, légèrement surannée, mais on y tenait. Bon-jour. »

« C’est ce soir-là que Jésus a inventé le “velours des Carpates”. Il désirait quelque chose de fort et de doux, un cocktail qui ressemblerait à Jolene. Un truc qu’on n’aurait pas vu venir. Il a pressé des citrons verts, sorti une bouteille de sirop de gingembre dont il n’avait jamais su que faire et ajouté une bonne dose de vodka. »

« Et, même s’il avait acheté leurs terrains au prix fort, une promesse est une promesse, surtout si elle est signée, paraphée en bas à droite sur chaque page, lue et approuvée contractuellement.
Il a eu des procès. Il a perdu des procès.
Reconnu coupable, il a culpabilisé.
Il a eu des amendes, il s’est amendé.
Il a payé des dommages et des intérêts, des préjudices. Il n’a rien négocié, il a tout payé.
Mais la société ne pardonne pas si vite. Il était devenu l’escroc mégalo. Il resterait l’escroc mégalo. »

« Jamais je n’avais vu Jésus aussi heureux et jamais il n’avait aussi bien porté son nom. Au milieu des déshérités, il ne prêchait pas la bonne parole, il se contentait d’accueillir et de faire au mieux. “Faire au mieux” était devenu sa spécialité. Lorsque Mario lui expliquait qu’il ne pourrait nourrir autant de monde, il lui demandait simplement et calmement de faire au mieux. Lorsqu’il y avait un problème de couverture, de courant d’air, de chasse d’eau, il nous demandait de faire au mieux. Il dégageait une étonnante sérénité. Et cette sérénité, il la devait à Jolene. »

« Le jour débutait et, pour marquer le coup, le soleil envoya trois rayons dans ma direction. Je parvins à éviter les deux premiers, me pris le troisième en plein visage. Ne voulant pas avoir de problème avec le soleil, je ne lui adressai aucun reproche et continuai ma route. J’avais marché toute la nuit. Il avait fait doux, léger vent d’ouest, faibles risques de pluie. »

 

Gilles Marchand est né en 1976 à Bordeaux. Il a notamment écrit Dans l’attente d’une réponse favorable (24 lettres de motivation) et coécrit Le Roman de Bolaño avec Éric Bonnargent. Son premier roman solo, Une bouche sans personne en 2016, attire l’attention des libraires (il est notamment sélectionné parmi les “Talents à suivre” par les libraires de Cultura, finaliste du prix Hors Concours, et remporte le prix des libraires indépendants “Libr’à Nous” en 2017) et de la presse, en proposant le curieux récit, le soir dans un café, d’un comptable le jour expliquant à ses amis pourquoi il porte en permanence une écharpe pour cacher une certaine cicatrice.

Il a été batteur dans plusieurs groupes de rock et a écrit des paroles de chansons.

Des mirages plein les poches
https://leressentidejeanpaul.com/2019/01/05/des-mirages-plein-les-poches-de-gilles-marchand/

Un funambule sur le sable
https://leressentidejeanpaul.com/2019/01/14/un-funambule-sur-le-sable-de-gilles-marchand/

Une bouche sans personne
https://leressentidejeanpaul.com/2020/04/26/une-bouche-sans-personne/

Une bouche sans personne
https://leressentidejeanpaul.com/2020/04/26/une-bouche-sans-personne/

Le soldat désaccordé
https://leressentidejeanpaul.com/2022/12/12/le-soldat-desaccorde/

Émotion, Drame, Histoire, Roman

L’Aurore

de Nicole Anglés
Relié – 14 mai 2023
Éditeur : Cap Béar Editions

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En 1934, Alba, jeune catalane âgée de seize ans, quitte le giron familial et une mère acariâtre.
Elle entre au service de doña Lucia, riche bourgeoise qui réside dans un magnifique hôtel particulier situé au coeur de Barcelone.
Pendant les années suivantes, l’Espagne connaîtra des bouleversements politiques majeurs, prémices d’années sombres pour l’Europe et le monde. Autant d’évènements qu’Alba, portée par des convictions profondes et la fougue de sa jeunesse, vivra intensément.
Ainsi commence l’aventure de sa vie…

Nicole Anglés, d’une écriture vivante et efficace, focalise l’histoire de ce roman sur l’implication des femmes combattantes durant la guerre d’Espagne.
Leur rôle déterminant dans la révolution sociale organisée par le mouvement libertaire en riposte au coup d’État militaire à l’origine du conflit.
Et leur engagement aux côtés de l’armée républicaine pour éviter l’inéluctable, la prise de pouvoir de la dictature franquiste en 1939.

 

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Tout d’abord, je tenais à remercier Nicole Anglés, qui grâce à son envoi, m’a permis de découvrir une nouvelle “auteure”…

Dès que j’ai reçu L’aurore, très vite, j’ai eu hâte de lire…

Alba, jeune espagnole catalane avait tout pour être heureuse. Mais malheureusement, elle n’est née, ni au bon endroit, ni à la bonne période. L’Espagne commence à subir la dictature franquiste. Avec ses amis et beaucoup d’autres de son âge, ils décideront de monter des groupes de soutien, anarchistes ou pas, le but étant de contrer la montée de l’extrême droite, menée par le général Franco.
Alba s’investit à cent pour cent dans son combat pour la liberté de tous. Elle a appris récemment à lire, alors la vie qui s’ouvrait tel un éventail sur l’avenir des “Femmes libres” se referme aussitôt !
Heureusement, elle n’est pas seule, son frère, sa sœur et ses amis, tous ensemble, ils décident de lutter… puis c’est aussi l’amour qui va entrer aussi dans sa vie à un moment où elle s’y attendais le moins, par le biais d’un jeune partisan qui a quitté sa Russie natale…

Magnifique, j’ai adoré. C’est tellement beau, c’est tellement fort, et si triste à la fois.
Un roman tel que je les aime. J’ai vécu, j’ai aimé et j’ai pleuré, pour tous ses jeunes à qui on a volé leur jeunesse et leur vie.

Le pouvoir !
Joder, je hais la violence, la guerre, les Hommes avec un grand H, qui ne comprennent jamais rien, à part le pouvoir, basta !!! L’Espagne subit les prémices de la nouvelle grande guerre qui s’annonçait dès 1934.

La lecture est très fluide, claire et interactive, pas le temps de s’ennuyer un instant. Beaucoup de dialogues, c’est vivant. On y croit. Le côté historique est omniprésent et c’est vraiment ce qui m’a plu. Essayer de comprendre tout ce que cette jeune génération à endurer, et ce, durant près de 40 ans !
La fin du roman est particulièrement prenante. J’en suis encore tout retourné…

D’ailleurs, je me suis demandé, un moment, si je n’aurai pas aimé quelques pages supplémentaires, pero no, le sujet est tellement bien géré et abouti.

Vale, merci Nicole, merci à toi pour ce cadeau qui a dû te coûter…
Tu m’as emporté loin, très loin… y gracias por supuesto por esta historia tan hermosa, dentro de la Historia.

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Extraits :

« Une lettre postée il y a soixante-cinq ans ! Où avait-elle disparu ?
S’exalta Claire.
La missive trônait sur la desserte de la chaleureuse cuisine.
Étrangère à la curiosité de la jeune femme penchée sur son épaule, au générique du débat diffusé sur France 5 qu’elle n’aurait manqué à aucun prix, la vieille dame semblait hypnotisée.
Sur l’enveloppe jaunie, du cachet espagnol affranchi à deux pesetas, on ne déchiffrait plus que l’année. Mil neuf cent trente-neuf. »

« Le pouvoir des mots. Les livres devaient bien receler quelque trésor s’ils méritaient cette monumentale et fastueuse salle.
Un livre peut changer une vie avait proclamé la señora Duran.
Était-ce exact ? Quel livre aurait le don de changer la sienne ? Serait-elle capable d’apprendre à lire ? Bénéficierait-elle de ces cours de lecture ? Elle n’était pas une ouvrière, pour autant n’était-elle pas une pauvre fille ? »

« Alba identifia la voix de Jordi, stupéfaite. Surprise par sa témérité, reconnaissant pourtant son tempérament idéaliste et sa générosité.
Cinq minutes s’écoulèrent, oppressantes, chacun guettant la réaction du camp adverse. Les gardes d’assaut et les membres de la garde civile s’interrogeaient du regard. Puis, le miracle. Tour à tour, ils abaissèrent leurs armes et rejoignirent le mouvement.
Une clameur d’espoir s’envola dans le ciel catalan. »

« – Je vais te montrer qui c’est qui commande ici ! Tu m’entends, traînée ?
Paco l’agrippa par les cheveux et la maintint plaquée à lui. Son haleine de vin aigre et de tabac froid imprégna Núria qui ne put se détourner lorsqu’il lui cracha dessus.
Projetée sur la table, la figure meurtrie par le chêne rugueux sur lequel la maintenait la poigne brutale de son mari, elle ne vit pas la satisfaction cruelle inonder le faciès de Paco. Une douleur violente irradia son corps quand il la pénétra d’un soubresaut bestial.
Nûria retint ses cris pour ne pas réveiller Ana, sagement endormie dans le lit à barreaux, sur le seuil de l’alcôve qui leur servait de chambre.
« Mon pauvre enfant, pardonne-moi de te donner naissance dans cette fange » implora-t-elle du petit être qui prenait forme dans son ventre »

« Adieu mon Alba, mon amour, ma vie.
Ton Anton. »

 

 

« Je veux écrire un livre ». J’ai jeté cette phrase à ma mère du haut de mes dix ans. C’était à Perpignan en 1971.

À cette époque, ma grand-mère disait en riant qu’elle ne travaillait pas assez pour payer tous les livres que je dévorais. Quelques feuillets se sont égarés et le temps a passé.

Je suis restée une lectrice passionnée. Aujourd’hui, à l’aube de ma seconde vie, j’ai repris la plume et accompli mon rêve. J’aimerais vous offrir ces cadeaux reçus de mes moments de lecture :
L’évasion, le rêve, l’amour, la colère, la tristesse, la peur, l’émotion… la Vie !
« La lecture, une porte ouverte sur un monde enchanté » disait François Mauriac.

Alors, bienvenue dans mon monde et bonne lecture !