Émotion, Drame, Histoire, Poésie, Roman

Madelaine avant l’aube

de Sandrine Collette
Broché – 21 août 2024
Éditions : JC Lattès

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C’est un endroit à l’abri du temps. Ce minuscule hameau, qu’on appelle Les Montées, est un pays à lui seul pour les jumelles Ambre et Aelis, et la vieille Rose.
Ici, l’existence n’a jamais été douce. Les familles travaillent une terre avare qui appartient à d’autres, endurent en serrant les dents l’injustice. Mais c’est ainsi depuis toujours.
Jusqu’au jour où surgit Madelaine. Une fillette affamée et sauvage, sortie des forêts. Adoptée par Les Montées, Madelaine les ravit, passionnée, courageuse, si vivante. Pourtant, il reste dans ses yeux cette petite flamme pas tout à fait droite. Une petite flamme qui fera un jour brûler le monde.

Avec Madelaine avant l’aube, Sandrine Collette questionne l’ordre des choses, sonde l’instinct de révolte, et nous offre, servie par une écriture éblouissante, une ode aux liens familiaux.

« Sandrine Collette s’élève au sommet de son art. »
Le Parisien

« Tout simplement impressionnant »
Lire Magazine littéraire

« Un roman intense et terrible »
Femme Actuelle

« La romancière est au sommet de son art. »
Version Femina

« Éblouissant »
Point de Vue

« Artisane d’une écriture mêlant tournures incantatoires et mots rugueux, sensations précises comme des coupures, images vives, nature puissante, Sandrine Collette fait tourbillonner les éléments du décor et les pantins qui l’habitent en un ballet macabre, captivant, tandis que les planètes s’alignent pour précipiter ce petit monde dans le chaos. »
Le Point

« Un génial tour de force »
La Vie

« Ce texte déborde de vie »
Télérama

« Une écriture magnifique »
Madame Figaro

« Notre Goncourt à nous. »
Le Parisien

« Une grande réussite »
Le Monde des Livres

« Un talent hors pair de raconteuse d’histoires »
L’OBS

« Un roman magistral »
Version Fémina

 

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C’est le septième roman de Sandrine Collette qui passe entre mes mains.
Sandrine, pour moi fait partie des autrices qui ont su s’affranchir d’une certaine bienveillance pour aller vers une prose personnelle, parfois choquante, parfois très poétique. Je ferme mon livre en me disant qu’encore une fois, elle nous offre une sacrée évasion littéraire…

Ce roman est un peu comme une ode. Une ode à la puissance de la nature, une ode à la famille, à l’histoire des paysans et tout simplement à la vie, dans un monde où les hommes et les femmes vivent courbés face à leurs maîtres. Ici, le droit de cuissage n’est pas une “légende”, il est la peur que ressentent toutes les femmes et toutes les jeunes filles. La vie est très dure, et les intempéries qui pourrissent les cultures n’arrangent rien à la faim qui est leur quotidien dans le hameau où ils vivent, que l’on ne peut situer ni dans le temps, ni dans les lieux. Tout ce que l’on sait, c’est que la vie est dure, très dure…
Et un jour, Madelaine, petite fille abandonnée, apparaît dans le hameau. Elle sera accueillie avec beaucoup de bienveillance par deux sœurs jumelles, Ambre et Aelis. Bran, le narrateur du récit, et personnage emblématique, voit tout de suite en Madelaine, une fille différente qui n’a peur de rien et est capable de s’imposer malgré son jeune âge face aux hommes. Bran l’aime et lui sera fidèle jusqu’au bout…

L’histoire est magnifique, et à un moment de ma lecture, je me suis rendu compte que Sandrine, par une ponctuation particulière, des phrases sans verbe, ou “presque” incomplètes, nous obligeait à créer une sorte de liens, de trouver nos propres mots pour avancer dans le récit !
Rien que pour ça, ce livre mérite votre attention, on est obligé d’entrer ainsi dans les pensées de l’autrice…

Récit prenant jusqu’aux entrailles, récit coup de poing et bouleversant qui sort des lieux communs et qui a élargi mon horizon… Encore une fois Sandrine frappe là où je ne l’attendais pas, mais quel plaisir…
Coup de cœur pour Madelaine, même si je ne sais toujours pas si elle m’a mené vers la lumière ou la noirceur, vers une suite… peut-être ?

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Extraits :

« La terre frémit sous leur pas lourd. Ils se hâtent, de cette lenteur presque hypnotique des grands corps épuisés après une journée de labeur – interrompue bien avant l’heure, quand l’enfant est venu. Ils vont côte à côte l’homme et le cheval, puant l’un et l’autre la sueur séchée sur leur peau rugueuse, le premier essuie la poussière qui fait du gris sur son front et l’autre secoue la tête pour se débarrasser des mouches. L’enfant marche devant, se retourne pour les attendre. Il ne dit rien, mais tout dans son attitude trahit son impatience. »

« Nous vivons au bout du monde. Le fleuve Basilic serpente sur toute la frontière de notre région, la coupant du reste de l’univers. De notre côté de la rivière, il y a quelques marais et puis en retrait, le village et derrière le village des fermes éparses comme celle de Rose, qui fait partie de cet ensemble de trois maisons qu’on appelle les Montées. Il y a des forêts et il y a des champs, et encore loin après, tout cela s’étiole et se termine par une montagne de lave presque verticale que personne ne s’est jamais aventuré à gravir. »

« Aelis et Ambre ont été inséparables, enfants. Elles n’avaient pas les mots pour parler d’âme-sœur pourtant il n’y en avait pas d’autre, deux petites filles n’en faisant qu’une tant leur communion d’esprit était forte, deux petites filles qui se suivaient telles des ombres, reproduisant exactement les gestes l’une de l’autre sans s’être copiées ni concertées, jusqu’au son de leur voix que leur mère ne différenciait pas. À elles deux, elles avaient créé un monde. Elles se suffisaient à elles-mêmes, ignorantes des regards qu’on leur jetait soit parce que leur ressemblance sidérait, soit parce que leur beauté fascinait. Elles inventaient des histoires qu’elles étaient seules à comprendre et qui ne faisaient rire qu’elles. Leur enfance fut un temps de partage et de bonheur. »

« L’hiver est passé sur le chagrin de Madelaine. Comme pour les hommes, la mort du chien est devenue invisible. On n’a plus le temps, ni la force. De plus en plus, les pensées sont obnubilées par la nécessité de se mettre quelque chose d’infime sous la dent chaque jour, cela a l’aigreur et l’acuité des poignards fouaillant les corps, la sensation est physique, terriblement réelle, tellement que lorsque les hommes ont crevé, on les a à peine pleurés. »

 

Sandrine Collette, née en 1970 à Paris, est une romancière française.
Elle aime la campagne profonde, la forêt, la montagne, les vignes. Tout naturellement, elle aime situer ses intrigues dans un univers rural, même si son petit polar Une brume si légère, est exceptionnellement urbain. La romancière part toujours d’une image qui lui permettra de dérouler le fil de sa fiction.
Devenue l’un des grands noms du thriller français, une fois encore, elle montre son savoir-faire imparable dans Six fourmis blanches (2015).

Il reste la poussière (2016) obtient le Prix Landerneau du polar.
En 2017 paraît Les larmes noires sur la terre.

Son huitième roman, Et toujours les forêts, une fiction post-apocalyptique, a été récompensé, en 2020, par le prix de La Closerie des Lilas, le prix Amerigo Vespucci 2020 et le grand prix RTL-Lire.

Elle partage son temps entre la région parisienne et son élevage de chevaux dans le Morvan.

Animal
https://leressentidejeanpaul.com/2021/01/19/animal/

Juste après la vague
https://leressentidejeanpaul.com/2019/10/10/juste-apres-la-vague-de-sandrine-collette/

Et toujours les Forêts
https://leressentidejeanpaul.com/2022/12/08/et-toujours-les-forets/

Émotion, Drame, Histoire vraie, Thriller

Le Dernier festin des vaincus

Estelle Tharreau
Poche – 2 novembre 2023
Éditions : Taurnada Éditions

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Un soir de réveillon, Naomi Shehaan disparaît de la réserve indienne de Meshkanau. Dans une région minée par la corruption, le racisme, la violence et la misère, un jeune flic, Logan Robertson, tente de briser l’omerta qui entoure cette affaire. Il est rejoint par Nathan et Alice qui, en renouant avec leur passé, plongent dans l’enfer de ce dernier jalon avant la toundra. Un thriller dur qui éclaire sur les violences intracommunautaires et les traumatismes liés aux pensionnats indiens, dont les femmes sont les premières victimes. « Au Canada, une autochtone a dix fois plus de risque de se faire assassiner qu’une autre femme. »

 

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Avec Le Dernier festin des vaincus, thriller vraiment très sombre et très dur, Estelle Tharreau rend un très bel hommage aux Indiens d’Amérique…

Tout le long de ma lecture, j’ai ressenti une souffrance très forte envers ce peuple, qui lui aussi a été complètement broyé par “l’Homme blanc”.
Un récit où les enfants sont maltraités, abusés sexuellement, quand ils ne sont pas tout simplement tués et enterrés au pied d’un arbre… j’ai eu régulièrement les larmes aux yeux. Lorsqu’ils essayaient de s’en sortir, c’est l’alcool, puis la drogue qu’on tendait vers eux. Dès lors, comment arriver à se construire lorsqu’on a perdu son identité culturelle, lorsque à peine adolescent, ils deviennent une main d’œuvre gratuite et soumise au bon vouloir de ceux qui les payent ?
Racisme. Discrimination. Corruption de la police qui ne fait rien pour les aider. Beaucoup de vérités s’échappent de ce récit.

Naomi, jeune autochtone Innu de 16 ans, de la réserve indienne Meshkanau, dans la région Nord Canadienne, a disparu. Sa mère, alcoolique refuse de se rendre au commissariat de Pointe-Cartier pour le déclarer.
Les jours passent… la police est finalement au courant, mais refuse d’enquêter sur cette disparition. Il faudra attendre encore plusieurs jours pour que deux étudiants et un jeune policier révolté par les combines de ses responsables, décident de s’en occuper. Mais, toute vérité n’est bonne à dire…

Entre fiction et réalité, Estelle nous montre la vie des Indiens dans les réserves. La peur des jeunes filles qui deviennent très tôt des proies, celles qui tombent enceinte, celles qui fuguent, et les autres qui disparaissent…
Cela faisait un moment que je n’avais ressenti autant de colère en lisant. Estelle, n’y va pas par quatre chemins. Son écriture est claire et concise. Finis les non-dits, elle va les montrer du doigt, ils devront assumer les conséquences de leurs actes !

Beaucoup d’émotions, beaucoup de colère, je termine bouleversé par ce très beau et triste récit…
Un thriller à lire absolument !

Décidément, les éditions Taurnada bousculent tout sur leur passage !
Merci encore Joël, pour ta confiance.

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Extraits :

« Michèle s’était empressée de rentrer chez elle, de déchirer le sac en papier et de boire une gorgée de whisky pour calmer son mal-être, pour se donner le courage de remettre une bûche dans le poêle, qui commençait à réchauffer la pièce. La morsure de l’alcool tant attendue et si apaisante ne parvint pas à lui faire oublier la voix paniquée de sa fille, le soir du réveillon, ainsi que son malaise en apercevant Peter dans la rue principale de Pointe-Cartier. »

« Avec sa force tranquille, il s’insurgeait et faisait hocher la tête des étudiants qui, comme leurs parents, leurs grands-parents, leurs arrière-grands-parents avant eux, étaient convaincus que l’Homme pouvait changer, s’amender et construire un monde meilleur avant qu’il ne soit trop tard ; toujours les mêmes espoirs avant le lent désenchantement d’une vie. »

« Ta place ? Mais ce n’est pas ta place de chef de bande que je veux, mais ma place ancestrale de femme Innue. Quand on avait encore un statut social et qu’on prenait part aux décisions pour tout ce qui touchait à la communauté. Quand on était respectées, et pas battues à tour de bras, parce que les hommes savaient qu’on était indispensables ; les gardiennes du campement quand ils partaient à la chasse. Je ne veux pas être chef de bande. Je veux seulement que les femmes reprennent leur place. Tu sais celle qu’elles occupaient quand les Innus possédaient encore leurs terres. »

« Depuis cette nuit, jamais Peter n’était parvenu à dormir profondément dans l’enfer des bruissements qui s’immisçaient dans les dortoirs ; le froissement délicat du tissu d’une soutane venant l’envelopper pour déverser son “amour” et son “réconfort” puis laisser le jour se lever sur le dégoût de soi et un sentiment d’impuissance inculqué dès l’enfance aussi violemment que l’amour de Dieu. »

« En sortant du pensionnat, on avait aucune qualification. On est rentrés chez nous sans rien. Avec encore moins qu’en y entrant. On y a laissé notre joie, notre insouciance, notre famille et notre culture pour repartir avec un traumatisme irréversible. »

 

Passionnée de littérature depuis l’adolescence, Estelle Tharreau parcourt les genres, les époques et les pays au fil des auteurs qu’elle rencontre. De cet amour de la littérature est née l’envie d’écrire. Elle vit actuellement en Franche-Comté où elle partage son temps entre sa famille et l’écriture.

– La peine du Bourreau
https://leressentidejeanpaul.com/2020/10/01/la-peine-du-bourreau/

– Les Eaux noires
https://leressentidejeanpaul.com/2021/10/05/les-eaux-noires/

– Digital Way of Life
https://leressentidejeanpaul.com/2022/06/14/digital-way-of-life/

– Il était une fois la guerre
https://leressentidejeanpaul.com/2022/11/01/il-etait-une-fois-la-guerre/