de Bob Slasher
Broché – 26 mai 2016
Éditeur : L’atelier Mosésu

« Tous des enflures. Coupables désignés. Cibles idéales de ta colère. Pourquoi essayer de mourir alors que des salauds vivent ? Pourquoi se punir soi-même quand tant d’autres le méritent ? »
Cinéphile averti, révolté contre le monde, Fred a enfin trouvé sa voie. Elle sera aussi tarée que sanglante. Et rendra hommage au septième art, le vrai. Le grand. Celui qui tache.

Bloody Glove fait partie de ces livres que j’aurais pu ne jamais lire… et rien que d’y penser, ça m’a filé un frisson.
Tout commence par la couverture. Rouge, sanglante, frontale. Elle m’a immédiatement replongé dans mon univers VHS d’adolescent. Halloween, Vendredi 13, Les Griffes de la nuit. Et ce nom d’auteur, Bob Slasher… plus qu’un clin d’œil, un véritable coup de poing, un doigt d’honneur ? Mais non, je ne l’ai pas dit !
Je savais à quoi m’attendre. Une écriture sombre, glauque, brutale. Certains diront sordide. Moi, j’y vois une cohérence totale avec l’univers revendiqué. Ici, pas de dentelle ni de phrases policées. Si vous cherchez la délicatesse de métaphores fleuries et de proses parfumées, passez votre chemin, mais tant pis pour vous.
Slasher écrit comme il découpe : droit au but, sans anesthésie. Il s’amuse avec tous les codes du genre. C’est référencé à outrance, bourré d’allusions savoureuses, Freddy Krueger, bien sûr, mais aussi Les Tontons flingueurs, Le Père Noël est une ordure, Gainsbourg se transforme en Gainsbarre, et les répliques sentent bon le zinc et la mauvaise foi.
J’ai ri. Oui, vraiment. Jaune, évidemment. Ce livre est cru, direct, sans filtre. Ça cogne, ça grogne, ça dit les choses sans demander pardon. Polar, thriller, roman d’humour noir ? Un peu tout à la fois… et bien plus encore.
Derrière la violence, si l’on accepte de lire entre les lignes, se cache surtout la souffrance d’un homme. Fred Parmentier, écorché vif, abandonné par sa femme, vidé de toute joie. Je n’ai jamais cautionné sa vengeance, mais je l’ai comprise.
Dans l’ombre, il façonne un gant hérissé de lames, prolongement de sa rage. Et il passe à l’acte.
Bloody Glove est une boucherie stylisée, un hommage furieux et jubilatoire au cinéma d’horreur des années glorieuses. Une écriture brute, sèche, percutante, une explosion de mauvais goût parfaitement assumée.
Ça tranche. Ça claque. C’est sale. C’est drôle. C’est excessif et ça marque.
Pour sortir des sentiers battus ? Oui.
Mais attention… vous pourriez bien en redemander.
Merci Marc.
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Extraits :
« T’es qu’un con.
Voilà. C’est à peu près tout ce qu’on pourrait dire. Oh, bien sûr, on pourrait broder, délayer un peu comme les journaleux ou les scribouillards savent si bien faire, trouver des façons plus élégantes de dire que t’es un con, mais au final, hein…
Ci-git Frédéric Parmentier.
1977 – 2016
Citoyen aimable, gentil, discret, avenant, effacé.
Un con.
Qui aimait rendre service. Bon voisin et ami fidèle.
Un…
Compagnon aimant, un…
Loser. »
« Tu fredonnes.
Je suis venu te dire que je m’en vais…
Tu respires profond. Tu fixes l’intérieur de ton poignet gauche.
Y appliques la lame du couteau et tu tranches d’un coup sec.
Le sang gicle.
La douleur pulse. Tu fixes le sang qui se mêle à l’eau chaude. C’est beau. Arabesques rouges dans le liquide trans-parent. Mais tu te dépêches aussi, pour pas perdre le rythme.
Le couteau change de main. Tu grimaces. Putain, ça fait mal.
D’un autre coup sec, tu tranches l’autre poignet.
La lame dévie sur l’os. Grince. Le sang coule quand même.
Pour la jouer un brin poétique, tu regardes la vie en train de s’écouler par tes poignets béants, sinon en vérité ça pisse et ça fait mal, ouais putain. Ça pisse foutrement vite.
Mais l’eau chaude te soulage.
Tu fermes les yeux.
Comme dit si bien Verlaine au vent mauvais… »
« Minuit, l’heure du crime…
Ton garage éclairé au néon. Le métal crie. Crache ses étincelles. T’y mets tout ton cœur et un paquet d’huile de coude, tu t’es jamais senti si vivant depuis des lustres. Des mois. Des années. Plutôt fier de toi, aussi. C’est pas le premier pékin venu qui pourrait inventer ce que toi, t’es en train d’inventer.
Concevoir ce que tu conçois. À la fois l’instrument de ta vengeance et un vibrant hommage au héros de ta jeunesse. »
« Tes yeux sont ouverts.
Dans l’obscurité de la nuit, de la chambre aux murs dépouillés – Tina est aussi partie avec la déco -, tu fixes le plafond que tu connais si bien. Pour l’avoir longtemps fixé. Ton sport national à une époque. Fixer ce foutu plafond et imaginer des choses… Horribles, de préférence. Visions de mort et de maladies. De solitude. Visions d’un bonheur impossible, car le malheur est partout. Il bouffe tout, attend son heure. Et à force de penser au pire, celui-ci finit par arriver… T’as déjà pensé à ça ? Au fait que ça puisse être ta faute ?
Non, bien sûr, toi tu blâmes les autres. Tu leur donnes à tous le mauvais rôle. Tu te réserves l’habit de lumière. T’es pas du genre à te remettre en question, comme type. »


Ni ange ni démon, Robert « Bob » Slasher n’est qu’un homme. Ce qui explique beaucoup de choses.
Enfant, il n’a pas torturé d’animaux mais toujours ressenti une attirance pour les films d’horreur. Le sang et l’angoisse. La catharsis de nos mauvaises pulsions. Après avoir hésité entre séminaire et armée, il choisit l’écriture. Par vocation et surtout refus de l’autorité, qu’elle soit divine ou militaire. Bob travaille seul. Il vivrait dans le nord de la France.
Bloody Glove est son premier roman.



































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