Histoire, Polar historique, Suspense

La chambre mortuaire

Les enquêtes de L’Aliéniste*
Jean-Luc Bizien
Broché – Grand livre, 11 avril 2024
Éditeur : L’Archipel

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La première enquête de Simon Bloomberg, aliéniste à la réputation sulfureuse.

Un roman qui mêle spiritisme et science lors de la préparation de l’expo universelle à Paris dans une ambiance proche d’Adèle Blanc-Sec de Tardi

Paris, juillet 1888. Un cadavre disparaît de la morgue, un autre corps est retrouvé, nu, sur les pavés après une chute vertigineuse.
Surviennent, bientôt, de nouvelles morts suspectes. L’inspecteur Desnoyers, flanqué de son adjoint Mesnard, qui applique les techniques les plus modernes, hante les rues sombres de la capitale. Il y démêlera les fils d’une conspiration qui le mène au Dr Simon Bloomberg, aliéniste à la réputation sulfureuse… que l’on dit plus dangereux encore que ses patients ! Et que penser de cette jeune Anglaise, Sarah Englewood, tout juste engagée par Bloomberg ?
Dans ce Paris où le spiritisme côtoie la science, où les esprits les plus cartésiens s’adonnent à l’absinthe, l’alcool qui rend fou, Desnoyers vacille : doit-il collaborer avec Bloomberg ou, au contraire, tout faire pour confondre le ténébreux aliéniste ?
Une à une, les découvertes morbides le rapprochent de la vérité… mais aussi du danger.

“Un face à face déconcertant, rare, dérangeant, impressionnant…
Jean-Luc Bizien est l’une des grandes voix du polar français.”
Gérard Collard

 

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J’avais déjà lu ce livre, il y a quelques années, En effet, il était paru une première fois en 2011. Jean-Luc l’a revu et fait quelques modifications pour cette nouvelle édition.

Dans un Paris angoissant, juillet 1888.
Simon Bloomberg est un médecin aliéniste, c’est le personnage principal de cette série historique et policière. L’exposition universelle, l’hôpital de la Pitié Salpêtrière et la clinique Sainte-Anne où les aliénés y étaient enfermés plus que soignés.

Les chapitres courts et se terminent régulièrement par un rebondissement, suscitant un intérêt grandissant au fur et à mesure de ma lecture, accentuant le suspense du récit. Jean-Luc Bizien nous plonge dans un Paris en plein essor, où l’étude des traitements des maladies mentales était encore à ses balbutiements…

Simon Bloomberg, est un homme plein de secrets. Le couple qu’il forme avec Sarah Englewood, sa gouvernante, est des plus attachants. Ulysse est un colosse un peu simplet, mais gare à ceux qui se frotteraient à lui ! Elzbieta, la femme de Simon Bloomberg, est égyptologue et se trouve au milieu de toutes les énigmes et un “drôle” de duo de policiers qui cherche à résoudre cette étrange enquête. La maison des Bloomberg joue elle aussi un rôle très important dans le récit. Avec son imposante présence et son atmosphère pleine de secrets… C’est un véritable musée dédié à l’Égypte.
Il sera aussi question de personnes disparues, d’un cadavre volé, de séances de spiritisme, de légendes anciennes… Commence alors un jeu de dupes et de manipulation nous entraînant dans une spirale infernale.

J’ai eu beaucoup de plaisir dans ma lecture, dont Jean-Luc ne dévoilera l’intrigue qu’à la toute fin, faisant ainsi un excellent polar sur une trame historique fouillée et toute en finesse, un scénario très original faisant référence à des faits réels ! J’ai aimé aussi ce mélange de mystères inexpliqués et d’enquêtes policières, le Paris de l’époque est superbement bien retranscrit.

Merci Jean-Luc pour ce très bon roman à l’intrigue bien menée, pour ses personnalités intéressantes et très diverses, toutes très attachantes, son suspense distillé au compte-gouttes.
Une véritable réussite !
Il ne me reste plus qu’une chose à faire… Il me faut relire la suite !

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Extraits :

« Augustin Piedvache s’étira avec un miaulement grotesque. L’air froid et humide réveillait de vilaines douleurs qu’il ne parvenait à soulager qu’à grand renfort de laudanum.
Par la fenêtre, le gardien promena un regard morne sur la Seine. Ce soir, la lune était pleine, des copeaux d’or s’accrochaient à la crête des vaguelettes. Augustin lâcha un ricanement amer. Et pourquoi pas des pépites, tant qu’on y était ? Il s’amusa de ce soudain accès de romantisme. L’eau de la Seine était immonde – on n’osait plus la boire, même si les autorités affirmaient à qui voulait bien les entendre qu’elle était potable. »

« L’aliéniste tenta d’aplanir la ride soucieuse qui barrait son front à la verticale, plissant la chair jusqu’entre ses sourcils sombres. Il relut ses dernières notes à voix basse. À l’issue de cet ultime examen, il apposa son buvard sur le feuillet et referma son journal intime. Il fit jouer le tiroir secret, y déposa le carnet de cuir, referma le compartiment et se leva après avoir entendu le déclic du système de sécurité. Il écarta le rideau à la fenêtre et hocha la tête, satisfait. Ce serait une belle journée. »

« Sarah avait le feu aux joues, À n’en pas douter, ce monsieur de Saint-Monastier était une vibrante statue élevée à l’arrogance des mâles ! Fort heureusement, elle avait su trouver les mots pour rabattre son vilain caquet.
Un doute affreux la saisit soudain : n’avait-elle pas commis une faute grave en se montrant aussi insolente ? Quelle était la nature des rapports entre son employeur et cet homme ?
« Seigneur, se dit-elle, tu as réagi en parfaite idiote. Ulysse pouvait se défendre tout seul. En te comportant de la sorte, tu as peut-être signé ton renvoi immédiat ! »

« “Rédiger son journal est une opération chirurgicale, se répétait Bloomberg. On extrait les idées de son esprit, on les traduit sur la feuille blanche. On découpe, on tranche. On sélectionne, on élimine. À l’arrivée, ne doit plus rester que l’essentiel, le vital.”
Sous la morsure du fer, le papier gémissait.
Les mots s’alignaient, serrés, nerveux. »

 

Né en 1963 à Phnom-Penh (Cambodge), Jean-Luc Bizien a vécu une grande partie de son enfance à l’étranger. Il a exercé pendant une quinzaine d’années la double profession d’auteur et d’enseignant avant de se consacrer totalement à l’écriture. Jean-Luc Bizien s’épanouit d’abord dans les jeux de rôles et les littératures de l’imaginaire : il a obtenu en 1994 le prix Casus Belli du meilleur jeu de rôles pour Chimères et a publié de nombreux livres pour la jeunesse.
En 2002, il a obtenu le prix du roman d’aventures pour La Mort en prime time et le prix Fantastic’Arts pour WonderlandZ. Passant avec bonheur d’un genre à l’autre, il est l’auteur aux éditions Gründ de Vivez l’Aventure, une série de livres-jeux illustrés qui rencontre un grand succès et de la “Trilogie des ténèbres”, des thrillers contemporains aux éditions du Toucan.
Les œuvres dont il est le plus fier sont cependant ses deux fils, Elric et Adriel, respectivement parus en 1990 et 2005.

Drame, Humour, Noir, Polar, Suspense, Thriller

Aughrus Point

La triade irlandaise*
de Gérard Coquet
Broché – 7 septembre 2023
Éditeur : M+

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L’Irlande est une île belle et sauvage.
Ses filles lui ressemblent.

Quand les circonstances obligent Ciara McMurphy à revenir sur ses terres natales, en tant que policière, elle replonge sans plaisir dans un monde qu’elle avait oublié.

Celui des luttes indépendantistes.
Celui de la violence et de la folie qui se danse.
Celui où la mythologie celtique explique tout.
Le silence de ceux qui détestent la Garda Síochána presque autant que les Anglais.
Le vieux Zac McCoy et les hommes de son clan sont toujours là, à veiller sur leurs fantômes.

La vengeance est-elle un hasard ?

 

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J’ai commencé ma lecture comme si j’avais entre les mains un roman “lambda”… Quelle erreur !

Au bout d’une cinquantaine de pages, je me suis rendu compte que si la “forme” était très agréable, sombre, pluvieuse et tourmentée, un meurtre pas-ci, un autre par-là, de la magie, des incantations, de belles descriptions des paysages, mais malgré une bonne dose d’humour, je me suis rendu compte que je n’avais pas saisi le “fond”, et que j’avais perdu l’intrigue du récit.

Stop, j’arrête tout.
Le mieux est peut-être de reprendre depuis le début, n’étant pas un spécialiste de l’histoire irlandaise ni des légendes celtes, surtout que les explications historiques et politiques sont assez présentes.

Oui, j’avais bien vite ressenti la passion de Gérard Coquet pour le pays (et pour la bière aussi… mais ça reste entre nous !), certains mots m’avaient perdu.
Je reprends donc ma lecture.
Il a même fallu que je prenne des notes pour m’y retrouver parmi tous les personnages tous les plus improbables les uns que les autres. Mais ça y est, j’ai définitivement mordu à l’hameçon… et pas besoin de Duck fly, de Connemara Black, ni de Rusty Rat, pour cela !

Difficile de ne pas s’attacher à certains personnages, notamment Ciara au caractère bien trempé, et tout en ambivalence, qui mène l’enquête au sein de la Garda Síochána, la police irlandaise, et se retrouve sur les traces de son passé qui l’a fortement marquée, lui faisant revivre de vieilles rancœurs.
Les légendes et le passé tumultueux de l’Irlande ont la peau dure, pas facile de tenir sa place pour une femme, malgré les drames et les meurtres qui la suivent de près. Mais elle n’a pas dit son dernier mot !

Un polar haletant, très noir, à travers les mythes et les légendes celtiques, et surtout la découverte de l’écriture de Gérard, soignée, érudite et poétique à la fois, avec ce roman violent entre polar et mystères…
Je recommande !

Je ne sais pas pour vous, mais une bonne bière serait la bienvenue… ou peut-être un Bushmills ?
Merci Gérard… pour ces bonnes idées !

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Extraits :

« La dernière phrase du curé résonne encore dans l’église. Zack McCoy, seul au premier rang, regarde ses souliers. Le gauche n’est pas très bien ciré. Aujourd’hui, les yeux rougis et la gorge nouée, il en veut au monde entier. Dans son dos, le raclement des pieds de chaises sur les dalles lui rappelle que la cruauté des hommes ne mérite pas l’apitoiement. »

« Ça n’a servi à rien. Jessica est morte d’une balle dans la tête, sur le parking du terminal d’embarquement de Ringaskiddy. Avant-hier, avec James O’Brien, il a creusé sa tombe. Aujourd’hui, le Connemara l’a enterrée. McCoy referme le registre et vide son verre de Jameson. L’alcool lui pique les yeux. Maintenant, il est seul et déjà vieux.

“Je ne me souviens plus au coin de quelle route
Ma vie a déposé le fardeau de l’espoir ;
Et j’ai tout vu mourir, la foi comme le doute
La tristesse du jour comme l’ennui du soir.”

Sa voix tremble quand il récite une nouvelle fois le poème de Jessica. Enfin, il pleure. Dieu lui laissera-t-il le temps de se venger ? »

« De toute façon, il n’a rien à craindre des pièges tendus par les flics, il suffira de brouiller les pistes sans apparaître au générique. Le grand, avec ses pompes râpées et sa dégaine de SDF, a le profil du con parfait. L’autre, la “chef” selon toute vraisemblance, semble plus difficile à tordre dans le bon sens. N’empêche, elle a un joli cul. Sur cette pensée, il se sert un Bushmills, le whiskey des protestants, et l’avale d’un coup de menton. De nouveau, il jette un coup d’œil par la fenêtre. En bas, les deux perdreaux montent enfin dans leur voiture.
“Elle a vraiment un joli cul !” »

« Lieutenant Ciara McMurphy, 39 ans, brune, cheveux mi-longs et légèrement frisés, des yeux bleus à hurler à la mort, le visage picoré des taches de rousseur réglementaires en Irlande. Belle comme un feu de la Saint-Jean et plus têtue qu’une ânesse. Tu sais qu’à un moment donné, j’étais amoureux d’elle ? Pas de bol, Fergus O’Brien, lui avait déjà foutu le grappin dessus. Aujourd’hui, on a enterré la hache de guerre, mais à l’époque, on s’est battu comme des chiens enragés. Si McCoy ne s’était pas interposé, tu parlerais avec un fantôme. »

 

 

Gérard Coquet est né le jour anniversaire de la mort de Louis XVI… le 21 janvier 1956. Mais il jure encore qu’il n’y est pour rien. Issu d’une longue lignée de blanchisseurs, il passe son enfance avec sa jumelle à se cacher au milieu des draps séchés au vent. Puis dans un ordre aléatoire se succèdent le collège des Lazaristes, un diplôme d’expert-comptable, la guitare basse et la création de ses premières chansons. D’ailleurs, tout vient sans doute de là, l’écriture…

Après la reprise de l’entreprise familiale, il devient juge consulaire avant de créer récemment un cabinet d’archi. Ce qui ne l’a jamais empêché d’adorer la charcuterie, le gamey, le tablier de sapeur et la cervelle de canut ! Sauf bien sûr quand il se ressource en Irlande avec la pêche à la mouche et la Guinness.
Il est aussi le vrai nom du deuxième « clavier » de Page Comann avec Ian Manook. Souviens-toi de Sarah et OUTAOUAIS ont été signé sous ce pseudo.

Son pays de prédilection est l’Irlande où il a séjourné à de nombreuses reprises et dont il s’est imprégné de la culture.

Philosophique, Polar historique

Vienne la nuit, sonne l’heure

Jean-Luc Bizien
Poche – 7 juin 2012
Éditeur : 10×18 – Grands détectives

Qu’est-ce que la violence ? Une question singulière à laquelle l’aliéniste Simon Bloomberg va chercher à répondre… pour son plus grand malheur. Au fil des jours, les troublantes confessions de ses patients révèlent leur part de cruauté la plus sombre. Dès lors, le praticien est plongé à son tour dans un tourbillon de fureur, au risque de se perdre lui-même au cœur des ténèbres.

Quand un psychiatre est pris dans l’engrenage de la violence.

 

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Comme je l’avais prévu, j’ai enchainé avec le 3ème tome de “La cour des miracles”…

J’ai eu moins de surprises avec le style de la narration très bien travaillé, qui m’a transporté automatiquement au XIXe siècle, les descriptions du Paris de l’époque sont toujours aussi réussies. Par contre l’évolution de la relation entre les personnages est très différente dans ce tome. On retrouve la jeune et belle Sarah et ses problèmes de cœur, Ulysse, le colosse aussi grand que gentil, qui sera lui la proie de ses démons. Mais ici, le personnage central, sera le docteur Bloomberg qui se pose tout un tas de questions. Des questions sur la vie, sur SA vie, SES compétences et SON avenir.
Va-t-il réussir à surmonter son deuil ?
Il se sent perdu…
Tout un tas de questions qui obscurcissent son jugement et vont mettre sa vie en péril.
Il est toujours amoureux d’Elzbiéta qui est décédée, mais, n’arrive pas à se passer de sa présence. Il continue ainsi à lui parler, allant même jusqu’à tenir un journal où il écrit toutes ses réflexions qui sont adressées aussi bien à elle, qu’à lui…

Ce troisième opus de la série est plus sombre.
Il est placé sous le signe de la violence et de la manipulation.
Mensonges, jalousies, un mari qui frappe sa femme ne supportant plus ses sorties quotidiennes, des secrets cachés au cœur des catacombes, des bagarres, un vrai labyrinthe… Bref, un récit chargé en émotions diverses et plus axé sur la psychologie aussi. Du coup beaucoup de choses “ont vibré” en moi. Parfois une sorte de vécu… Sur la violence, l’injustice et la peur d’un futur de plus en plus compliqué à appréhender.

J’espère que comme moi vous vous laisserez entraîner par l’histoire !
Je n’ai rien vu venir… Le dénouement est excellent… Mais Chuuut…
Vous trouverez vous-même les réponses en temps voulu !

Je ne dirai qu’une chose.
Bravo Jean-Luc !

Encore une fois ce roman peut se lire séparément des autres tomes, mais le mieux reste de les lire dans l’ordre chronologique, afin de suivre toutes les progressions psychologiques. “La chambre mortuaire”, “La main de gloire”, puis celui-ci.
J’attendrai la suite avec impatience, si jamais suite il y a !

Premier volet de la saga :
https://leressentidejeanpaul.com/2020/08/17/la-chambre-mortuaire/

Second volet de la saga :
https://leressentidejeanpaul.com/2020/09/04/la-main-de-gloire/

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Extraits :

« – Oui, je suis violent ! martelait Genest. Mais je retourne le plus souvent cette colère contre moi. C’est à moi que je fais du mal, c’est moi que je punis. Je brise des objets qui me sont chers, je frappe les murs, je ME châtie… pour des choses que je n’ai pas commise, mais dont la cruelle injustice ne m’est que souffrance. »

…/…

« Je pense à toi, Elzbiéta, à ce qu’ils t’ont fait subir. À ton visage quand je t’ai retrouvé, à ta peau glacée sous mes doigts… je n’ai pas su te protéger, je n’ai pas deviné les dangers qui te menaçaient.
Ne serais-je pas, une fois encore, l’unique responsable s’il lui arrive quelque chose ?
Mais je ne sais comment la mettre en garde sans outrepasser mes fonctions, sans apparaître pour ce que je ne suis pas – ou ce que je ne veux pas être.

J’aimerais tant que tu sois là, Elzbiéta !
Tu saurais trouver les mots. »

 

 

Né en 1963 à Phnom-Penh (Cambodge), Jean-Luc Bizien a vécu une grande partie de son enfance à l’étranger. Il a exercé pendant une quinzaine d’années la double profession d’auteur et d’enseignant avant de se consacrer totalement à l’écriture. Jean-Luc Bizien s’épanouit d’abord dans les jeux de rôles et les littératures de l’imaginaire : il a obtenu en 1994 le prix Casus Belli du meilleur jeu de rôles pour Chimères et a publié de nombreux livres pour la jeunesse. En 2002, il a obtenu le prix du roman d’aventures pour “La Mort en prime time” et le prix Fantastic’Arts pour “WonderlandZ”. Passant avec bonheur d’un genre à l’autre, il est l’auteur aux éditions Gründ de Vivez l’Aventure, une série de livres-jeux illustrés qui rencontre un grand succès et de la “Trilogie des ténèbres”, des thrillers contemporains aux éditions du Toucan.
Les œuvres dont il est le plus fier sont cependant ses deux fils, Elric et Adriel, respectivement parus en 1990 et 2005.

Émotion, Philosophique

Impasse Verlaine

Dalie Farah (Auteur)
Broché – 4 juin 2020
Éditeur : Mon poche

Dans ses montagnes berbères, Vendredi, l’effrontée, cabriole parmi les chèvres pour faire rire son père adoré et subit à la maison l’oeil redoutable et la main leste de sa mère. Jusqu’au jour où on la marie à un homme qui lui répugne et l’emmène vivre de l’autre côté de la Méditerranée. A seize ans, désespérée d’être enceinte, elle accouche d’une petite fille à qui elle portera un amour étonné et brutal. Impasse Verlaine, en Auvergne, la fille de Vendredi remplit les dossiers administratifs pour la famille et les voisins, fait des ménages avec sa mère, arrive parfois en classe marquée des coups reçus chez elle. En douce, elle lit Dostoïevski et gagne des concours d’écriture, aime un Philippe qui ne la regarde pas et l’école qui pourtant ne veut pas voir la violence éprouvée. C’est l’histoire de deux enfances cruelles et joyeuses, l’histoire d’une mère et de sa fille liées par un amour paradoxal. Un récit unique et universel où l’humour côtoie la poésie dans un élan d’une vitalité impérieuse et magnifique.

 

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Bonjour à toutes et à tous…

Aujourd’hui, je vous parle du premier roman de Dalie Farah, que je ne connaissais pas encore lundi !
En effet, lundi soir en rentrant chez moi, au milieu des factures et des courriers divers, il y avait un livre… “Impasse Verlaine” de Dalie Farah !
Pas de petit mot, aucune indication sur l’expéditeur de cette “surprise”.
Dommage, j’aurais aimé pouvoir le (la ?) remercier.

La quatrième de couverture a tout de suite résonné en moi, malgré la différence de nos langues maternelles et de nos dieux réciproques.
Une petite fille a une maman femme de ménage, qui ne sait pas lire le français, à la maison elle s’occupe des dossiers administratifs, elle arrive parfois en classe marquée des coups reçus à la maison et elle aussi lit le soir en cachette…

Il fallait que je cherche à joindre Dalie, pour le lui dire.
Très gentiment elle m’a répondu :
– “Merci Jean-Paul. Je crois au contraire que nous avons la même langue et il semblerait que c’est la littérature… et quant à Dieu, je vous laisse lire la suite.
Bonne lecture et merci de votre message. À bientôt pour votre impression générale !”

J’ai tout de suite su que j’allais de nouveaux bouleverser l’ordre de ma PAL.

C’est un magnifique roman que j’ai lu d’une traite. Il m’était impossible de le laisser avant de l’avoir terminé. J’ai vraiment été très troublé de toutes les similitudes que j’ai pu trouver dans ce roman, avec ma vie d’enfant, puis d’adolescent. Une expérience de lecture que je n’avais encore jamais vécu, entre larmes et sourires… et heureusement que l’humour est là, pour tenir le drame à distance !

Dans ce premier roman, publiée par Grasset, Dalie a pour moi, une vraie qualité d’écriture, en évitant le pathos mais sans se voiler la face.

Djemaa ou (Vendredi, suite au jour de sa naissance), une jeune algérienne de 15 ans, est donnée en mariage à un algérien qui travaille en France. Il a 20 ans de plus qu’elle. La mère de vendredi, veuve, a trop d’enfants et n’arrive plus à s’en sortir.
Très vite (en 1973), Vendredi accouche en France après avoir essayé de se débarrasser plusieurs fois de son bébé. Une relation mère-fille qui débute très mal. Vendredi ne manifeste aucun amour pour sa fille et la battra régulièrement. Du coup cette enfance difficile permettra à l’enfant de devenir une adolescente de caractère !
Je pense qu’il y a une grande part autobiographique, avec cette fillette qui n’est jamais nommée de tout le roman.

C’est l’histoire de deux filles que 15 ans séparent. La première est née en Algérie, la seconde à Clermont-Ferrand, entre la haine et l’amour, une véritable ode à la liberté et à la vie !

Plus qu’un coup d’essai, c’est un coup de maître…
Beaucoup d’émotions portées par une magnifique écriture tendre et incisive, drôle et douloureuse que je ne suis pas prêt d’oublier.

À lire absolument !!!

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Extrait :

« La dernière fois que je prends mon vélo rouge, c’est le ramadan, et j’ai presque dix-sept ans. Des années que je jeûne, des années que je prie, des années que j’enfourche l’espérance, le courage, la charité, la bienfaisance, le devoir et la bonté. J’aime jeûner parce que je ne suis pas obligée de rentrer entre midi et deux. J’aime jeûner parce que je peux manger une omelette aux tomates pour rompre le jeûne, j’aime jeûner parce qu’il faut bien le dire, le jeûne est joyeux.
…/…
Le lendemain, quinzième jour du ramadan, à l’ouverture du portail du lycée, je me précipite au lavabo des toilettes. Je fais couler l’eau du robinet. Je penche le nez sous le savon jaune citron rotatif. J’hésite. L’interdit assèche la gorge. J’ai peur de Dieu et de ma mère. L’un et l’autre ont les moyens de me deviner. Mais en mémoire du vélo défunt et innocent de mes turpitudes, je tends les lèvres et y laisse couler l’eau. Je bois mon jeûne. L’eau étanche enfin le petit foyer de vengeance apostasique. Cette gorgée d’eau est la plus mystique gorgée d’eau de ma vie, Allah doit définitivement renoncer à moi. »

 

 

Née en Auvergne en 1973, de parents immigrés d’Algérie, Dalie Farah fait des études de littérature et de linguistique, elle travaille dix ans en collège ZEP et actuellement, est agrégée de lettres et enseigne en classes préparatoires près de Clermont-Ferrand. Impasse Verlaine (2019) est son premier roman.