Philosophique, Polar historique

Vienne la nuit, sonne l’heure

Jean-Luc Bizien
Poche – 7 juin 2012
Éditeur : 10×18 – Grands détectives

Qu’est-ce que la violence ? Une question singulière à laquelle l’aliéniste Simon Bloomberg va chercher à répondre… pour son plus grand malheur. Au fil des jours, les troublantes confessions de ses patients révèlent leur part de cruauté la plus sombre. Dès lors, le praticien est plongé à son tour dans un tourbillon de fureur, au risque de se perdre lui-même au cœur des ténèbres.

Quand un psychiatre est pris dans l’engrenage de la violence.

 

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Comme je l’avais prévu, j’ai enchainé avec le 3ème tome de “La cour des miracles”…

J’ai eu moins de surprises avec le style de la narration très bien travaillé, qui m’a transporté automatiquement au XIXe siècle, les descriptions du Paris de l’époque sont toujours aussi réussies. Par contre l’évolution de la relation entre les personnages est très différente dans ce tome. On retrouve la jeune et belle Sarah et ses problèmes de cœur, Ulysse, le colosse aussi grand que gentil, qui sera lui la proie de ses démons. Mais ici, le personnage central, sera le docteur Bloomberg qui se pose tout un tas de questions. Des questions sur la vie, sur SA vie, SES compétences et SON avenir.
Va-t-il réussir à surmonter son deuil ?
Il se sent perdu…
Tout un tas de questions qui obscurcissent son jugement et vont mettre sa vie en péril.
Il est toujours amoureux d’Elzbiéta qui est décédée, mais, n’arrive pas à se passer de sa présence. Il continue ainsi à lui parler, allant même jusqu’à tenir un journal où il écrit toutes ses réflexions qui sont adressées aussi bien à elle, qu’à lui…

Ce troisième opus de la série est plus sombre.
Il est placé sous le signe de la violence et de la manipulation.
Mensonges, jalousies, un mari qui frappe sa femme ne supportant plus ses sorties quotidiennes, des secrets cachés au cœur des catacombes, des bagarres, un vrai labyrinthe… Bref, un récit chargé en émotions diverses et plus axé sur la psychologie aussi. Du coup beaucoup de choses “ont vibré” en moi. Parfois une sorte de vécu… Sur la violence, l’injustice et la peur d’un futur de plus en plus compliqué à appréhender.

J’espère que comme moi vous vous laisserez entraîner par l’histoire !
Je n’ai rien vu venir… Le dénouement est excellent… Mais Chuuut…
Vous trouverez vous-même les réponses en temps voulu !

Je ne dirai qu’une chose.
Bravo Jean-Luc !

Encore une fois ce roman peut se lire séparément des autres tomes, mais le mieux reste de les lire dans l’ordre chronologique, afin de suivre toutes les progressions psychologiques. “La chambre mortuaire”, “La main de gloire”, puis celui-ci.
J’attendrai la suite avec impatience, si jamais suite il y a !

Premier volet de la saga :
https://leressentidejeanpaul.com/2020/08/17/la-chambre-mortuaire/

Second volet de la saga :
https://leressentidejeanpaul.com/2020/09/04/la-main-de-gloire/

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Extraits :

« – Oui, je suis violent ! martelait Genest. Mais je retourne le plus souvent cette colère contre moi. C’est à moi que je fais du mal, c’est moi que je punis. Je brise des objets qui me sont chers, je frappe les murs, je ME châtie… pour des choses que je n’ai pas commise, mais dont la cruelle injustice ne m’est que souffrance. »

…/…

« Je pense à toi, Elzbiéta, à ce qu’ils t’ont fait subir. À ton visage quand je t’ai retrouvé, à ta peau glacée sous mes doigts… je n’ai pas su te protéger, je n’ai pas deviné les dangers qui te menaçaient.
Ne serais-je pas, une fois encore, l’unique responsable s’il lui arrive quelque chose ?
Mais je ne sais comment la mettre en garde sans outrepasser mes fonctions, sans apparaître pour ce que je ne suis pas – ou ce que je ne veux pas être.

J’aimerais tant que tu sois là, Elzbiéta !
Tu saurais trouver les mots. »

 

 

Né en 1963 à Phnom-Penh (Cambodge), Jean-Luc Bizien a vécu une grande partie de son enfance à l’étranger. Il a exercé pendant une quinzaine d’années la double profession d’auteur et d’enseignant avant de se consacrer totalement à l’écriture. Jean-Luc Bizien s’épanouit d’abord dans les jeux de rôles et les littératures de l’imaginaire : il a obtenu en 1994 le prix Casus Belli du meilleur jeu de rôles pour Chimères et a publié de nombreux livres pour la jeunesse. En 2002, il a obtenu le prix du roman d’aventures pour “La Mort en prime time” et le prix Fantastic’Arts pour “WonderlandZ”. Passant avec bonheur d’un genre à l’autre, il est l’auteur aux éditions Gründ de Vivez l’Aventure, une série de livres-jeux illustrés qui rencontre un grand succès et de la “Trilogie des ténèbres”, des thrillers contemporains aux éditions du Toucan.
Les œuvres dont il est le plus fier sont cependant ses deux fils, Elric et Adriel, respectivement parus en 1990 et 2005.

Émotion, Philosophique

Impasse Verlaine

Dalie Farah (Auteur)
Broché – 4 juin 2020
Éditeur : Mon poche

Dans ses montagnes berbères, Vendredi, l’effrontée, cabriole parmi les chèvres pour faire rire son père adoré et subit à la maison l’oeil redoutable et la main leste de sa mère. Jusqu’au jour où on la marie à un homme qui lui répugne et l’emmène vivre de l’autre côté de la Méditerranée. A seize ans, désespérée d’être enceinte, elle accouche d’une petite fille à qui elle portera un amour étonné et brutal. Impasse Verlaine, en Auvergne, la fille de Vendredi remplit les dossiers administratifs pour la famille et les voisins, fait des ménages avec sa mère, arrive parfois en classe marquée des coups reçus chez elle. En douce, elle lit Dostoïevski et gagne des concours d’écriture, aime un Philippe qui ne la regarde pas et l’école qui pourtant ne veut pas voir la violence éprouvée. C’est l’histoire de deux enfances cruelles et joyeuses, l’histoire d’une mère et de sa fille liées par un amour paradoxal. Un récit unique et universel où l’humour côtoie la poésie dans un élan d’une vitalité impérieuse et magnifique.

 

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Bonjour à toutes et à tous…

Aujourd’hui, je vous parle du premier roman de Dalie Farah, que je ne connaissais pas encore lundi !
En effet, lundi soir en rentrant chez moi, au milieu des factures et des courriers divers, il y avait un livre… “Impasse Verlaine” de Dalie Farah !
Pas de petit mot, aucune indication sur l’expéditeur de cette “surprise”.
Dommage, j’aurais aimé pouvoir le (la ?) remercier.

La quatrième de couverture a tout de suite résonné en moi, malgré la différence de nos langues maternelles et de nos dieux réciproques.
Une petite fille a une maman femme de ménage, qui ne sait pas lire le français, à la maison elle s’occupe des dossiers administratifs, elle arrive parfois en classe marquée des coups reçus à la maison et elle aussi lit le soir en cachette…

Il fallait que je cherche à joindre Dalie, pour le lui dire.
Très gentiment elle m’a répondu :
– “Merci Jean-Paul. Je crois au contraire que nous avons la même langue et il semblerait que c’est la littérature… et quant à Dieu, je vous laisse lire la suite.
Bonne lecture et merci de votre message. À bientôt pour votre impression générale !”

J’ai tout de suite su que j’allais de nouveaux bouleverser l’ordre de ma PAL.

C’est un magnifique roman que j’ai lu d’une traite. Il m’était impossible de le laisser avant de l’avoir terminé. J’ai vraiment été très troublé de toutes les similitudes que j’ai pu trouver dans ce roman, avec ma vie d’enfant, puis d’adolescent. Une expérience de lecture que je n’avais encore jamais vécu, entre larmes et sourires… et heureusement que l’humour est là, pour tenir le drame à distance !

Dans ce premier roman, publiée par Grasset, Dalie a pour moi, une vraie qualité d’écriture, en évitant le pathos mais sans se voiler la face.

Djemaa ou (Vendredi, suite au jour de sa naissance), une jeune algérienne de 15 ans, est donnée en mariage à un algérien qui travaille en France. Il a 20 ans de plus qu’elle. La mère de vendredi, veuve, a trop d’enfants et n’arrive plus à s’en sortir.
Très vite (en 1973), Vendredi accouche en France après avoir essayé de se débarrasser plusieurs fois de son bébé. Une relation mère-fille qui débute très mal. Vendredi ne manifeste aucun amour pour sa fille et la battra régulièrement. Du coup cette enfance difficile permettra à l’enfant de devenir une adolescente de caractère !
Je pense qu’il y a une grande part autobiographique, avec cette fillette qui n’est jamais nommée de tout le roman.

C’est l’histoire de deux filles que 15 ans séparent. La première est née en Algérie, la seconde à Clermont-Ferrand, entre la haine et l’amour, une véritable ode à la liberté et à la vie !

Plus qu’un coup d’essai, c’est un coup de maître…
Beaucoup d’émotions portées par une magnifique écriture tendre et incisive, drôle et douloureuse que je ne suis pas prêt d’oublier.

À lire absolument !!!

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Extrait :

« La dernière fois que je prends mon vélo rouge, c’est le ramadan, et j’ai presque dix-sept ans. Des années que je jeûne, des années que je prie, des années que j’enfourche l’espérance, le courage, la charité, la bienfaisance, le devoir et la bonté. J’aime jeûner parce que je ne suis pas obligée de rentrer entre midi et deux. J’aime jeûner parce que je peux manger une omelette aux tomates pour rompre le jeûne, j’aime jeûner parce qu’il faut bien le dire, le jeûne est joyeux.
…/…
Le lendemain, quinzième jour du ramadan, à l’ouverture du portail du lycée, je me précipite au lavabo des toilettes. Je fais couler l’eau du robinet. Je penche le nez sous le savon jaune citron rotatif. J’hésite. L’interdit assèche la gorge. J’ai peur de Dieu et de ma mère. L’un et l’autre ont les moyens de me deviner. Mais en mémoire du vélo défunt et innocent de mes turpitudes, je tends les lèvres et y laisse couler l’eau. Je bois mon jeûne. L’eau étanche enfin le petit foyer de vengeance apostasique. Cette gorgée d’eau est la plus mystique gorgée d’eau de ma vie, Allah doit définitivement renoncer à moi. »

 

 

Née en Auvergne en 1973, de parents immigrés d’Algérie, Dalie Farah fait des études de littérature et de linguistique, elle travaille dix ans en collège ZEP et actuellement, est agrégée de lettres et enseigne en classes préparatoires près de Clermont-Ferrand. Impasse Verlaine (2019) est son premier roman.