Émotion, Histoire vraie, Témoignage

Einstein, le sexe et moi

de Olivier Liron
Poche – 14 août 2019
Éditions : Points

Top ! Je suis un garçon fougueux, normalien et autiste Asperger. Mon enfance n’a pas toujours été rose à cause de ma différence. Je suis fasciné par les dates et calcule le produit de 247856 par 91 pour m’endormir. En 2012, j’ai participé à l’émission Questions pour un champion, une expérience libératrice. Entre deux épreuves, je trempe toujours une madeleine dans du coca… Je suis… Je suis… Olivier Liron ! Oui !

Né en 1987, Olivier Liron a étudié à l’École normale supérieure avant de se consacrer à l’écriture et au théâtre.


ELLE

 

 

J’ai rencontré Olivier Liron, le 16 avril, à Valmondois, où nous avions pu discuter un peu (pas assez à mon goût…), pendant le Rock’n Books 2022.
Puis, j’ai lu l’excellent “Livre de Neige”, où il raconte l’histoire de sa mère et de sa famille…
Depuis, je voulais en savoir un peu plus sur lui, savoir ce qui pouvait bien se “passer” dans sa tête !

Et bien dans sa tête… Il y en a des choses !
Certaines qui lui ont permis de s’épanouir, d’autres qui malheureusement ont dû peser bien lourd sur ses épaules d’enfant.

Avec “Einstein, le sexe et moi”, il soulève un peu le rideau personnel de sa vie. Il dévoile et partage les embûches qui ont fait et font encore régulièrement parties de son quotidien, avec une grande question centrale.
Qu’est-ce que la normalité ?
Qui décide de ce qui est normal et de ce qui ne l’est pas ?
D’où vient la notion de « normalité », alors que nous sommes tous si différents ?
Grand, noir, petit, blanc, bègue, sourd… Gros, maigre… Atteint de cécité ou même autiste Asperger…

Il n’y aurait donc pas de normalité ?

Et non… Juste des différences, et qu’il faut apprendre à vivre avec…

C’est justement de toutes ses/ces différences dont nous parle Olivier.
Il est autiste Asperger ? Et alors… ce n’est pas une maladie !

“Einstein, le sexe et moi” est un roman coup de poing !
Avec des anecdotes, de l’émotion, beaucoup d’intelligence (c’est normal…), et de l’humour aussi (et oui…), des madeleines trempées dans du Coca, plein de question où j’ai pu aussi m’amuser à répondre au fur et à mesure de ma lecture… Olivier nous entraîne dans une farandole très personnelle, sa participation à “Questions pour un champion”, point de départ du début de son “autre” vie… En faisant des allers/retours vers son passé, sa famille, l’école (les profs… quelle galère !), les amis (les quoi ???) les filles (Heu… pas trop quand même…), ses silences, la honte qu’il ressent tout le temps, sa honte d’avoir honte et les préservatifs (comment ça marche ça encore ???…)…
Mais aussi une déclaration d’amour incroyable, de toute beauté, brute et vivante ! La plus belle que j’ai lue à ce jour…

J’ai été triste pour Olivier à certains moments, mais j’ai aussi ri avec lui, à la grande surprise des gens autour de moi dans les transports. Olivier ! Il y en a même un qui est venu me demander ce que je lisais et l’a noté ! Si, si je t’assure… Un futur nouveau lecteur…

Alors, STOP à la normalité !
Nos différences, nos révoltes peuvent faire de nous le meilleur de nous-même… Oui, on peut transformer la vie, notre vie.
Faites comme Olivier. Un pas devant l’autre… Un à la fois.
Le meilleur restera toujours à venir !

Une très belle lecture, sincère et toute en émotion qui passe par toutes les étapes d’une vie “normale”…

PS. OLivier, Face à la violencedu monde, je pense que la littérature peut beaucoup !

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Extraits :

« Je suis autiste Asperger. Ce n’est pas une maladie, je vous rassure. C’est une différence. Je préfère réaliser des activités seul plutôt qu’avec d’autres personnes. J’aime faire les choses de la même manière. Je prépare toujours les croque-monsieur avec le même Leerdammer. Je suis fréquemment si absorbé par une chose que je perds tout le reste de vue. Mon attention est souvent attirée par les bruits discrets que les autres ne perçoivent pas. »

« J’ai dans mes tripes la mémoire de la différence qu’on m’a apprise, qu’on a tatouée dans ma chair. Mes oreilles trop grandes, objet de risée et qui subissaient tellement de pichenettes et de coups qui défonçaient leur cartilage, qu’elles saignaient à la fin de la journée, et que je devais coller ma tête chaque soir contre la vitre du bus scolaire pour apaiser la brûlure et leur faire sentir le froid… Je n’oublierai jamais la sensation de douleur dans mes oreilles, pas uniquement sur le lobe, mais à l’intérieur, une douleur sourde et perçante à l’intérieur, chaque fois plus insupportable. Elle est insignifiante et si forte que je la ressens encore aujourd’hui. »

« C’est marrant, je parle du corps, mais j’ai l’impression que les mots ont encore plus de pouvoir que les coups, que les mots sont les coups qui ne partent jamais, les plus indélébiles, les plus violents pour le corps, justement. Je pense que le mot que j’ai entendu le plus jusqu’à mes quatorze ans est “gogol”. J’ai dû entendre dix mille fois les gens m’appeler gogol. À l’école, et surtout au collège, les enfants différents souffrent le martyre. C’est déjà le pouvoir hideux et haineux de la norme. Aujourd’hui encore quand j’entends à la radio les “normaux” ceux qui ont le pouvoir de la norme, de dicter la norme, de faire la norme, les politiciens et les financiers, les humoristes pas drôles, les haineux de tous bords, j’ai envie de les déchiqueter avec les dents. Pour leur montrer de quel bois on se chauffe, nous les gogols. »

« Jusqu’au moment où je suis tombé amoureux comme on se fait écraser par un train, d’une fille qui s’appelait Barbara. Barbara était belle à en mourir, elle avait les yeux verts et un rire dont je pourrais parler pendant des heures. J’étais fou amoureux d’elle. Quand elle riait, j’étais amoureux. Quand elle chuchotait, j’étais amoureux. Lorsqu’elle pleurait ses amours mortes, j’étais amoureux ; quand elle se taisait, j’étais amoureux ; je la comprenais ; je l’écoutais ; à jamais je l’aimais. »

 

 

Olivier Liron est né en 1987, il vit à Paris. Normalien et agrégé d’espagnol, il enseigne la littérature comparée à l’université Paris 3-Sorbonne Nouvelle avant de se consacrer à l’écriture et au théâtre. Il se forme en parallèle à l’interprétation et à la danse contemporaine à l’École du Jeu et au cours Cochet. Son premier roman, Danse d’atomes d’or, est publié en 2016 chez Alma Éditeur. Il est également l’auteur de pièces de théâtre, de scénarios pour le cinéma et de fictions sonores pour le Centre Pompidou.

Adolescence, Émotion, Humour

Je ne suis plus inquiet

de Scali Delpeyrat
Broché – 14 octobre 2020
Édition : Acte Sud

 

De l’histoire de ses grands-parents échappés aux rafles du Vel d’Hiv aux voix enregistrées dans le métro, en passant par un cadeau de Noël décevant, ou par les femmes qu’il n’a pas réussi à aimer, Scali Delpeyrat, dans ce récit à la première personne, drôle et tendre, se raconte en toute intimité. Et si tout cela n’était que l’histoire d’un père qu’on a aimé bien plus qu’on ne l’avait pensé ?

 

 

 

J’ai pris ce petit livre comme un “cadeau”, une pose, un moment de lecture qui, pour moi a ralenti le temps… Impossible de résumer cette compilation d’idées et de réflexions qui vous fera passer par tout type d’émotions.
C’est drôle, c’est barré, c’est touchant… C’est la vie quoi !

Brouillon ? Oh que non !
Certaines vous feront réfléchir, d’autres vous feront rire, et d’autres encore nous recentreront sur notre condition humaine, et oui, “On est bien peu de choses sur cette terre !” Qui ne s’est jamais posé ce genre de questions, qui n’a jamais vécu ces scènes dans son quotidien ?

Apparemment, il n’y a pas de lien entre les textes, mais très vite, vous trouverez ici et là, des réminiscences, des idées floutées qui s’affineront et finalement, vous aiguilleront vers de “vrais” liens entre certains d’entre eux.

“Je ne suis plus inquiet”, c’est ça !
Ce sont des tranches de la vie de Scali, ses grands-parents juifs, son père, son enfance, le Sud-ouest, des questionnements souvent, des réponses parfois, et toujours avec une légèreté truffée d’humour. C’est mélancolique et ça déborde d’amour.
C’est aussi un livre que je ne rangerai pas, un livre qui restera à portée de main. Un livre où je pourrai de temps en temps “re-piocher” certaines scénettes tout en souriant, en sachant que la réflexion ne sera jamais loin… Je repenserai aussi à Scali, à son sourire, sa bonne humeur, ses chansons…

Un livre, pour les doux rêveurs, les décalés jamais pressés, mais aussi pour les curieux inassouvis, qui comme moi se posent continuellement des questions…

Une belle découverte, qui mérite une transmission écrite et pourquoi pas orale !
Personnellement, je ne vivrai plus jamais les “transports publics” de la même façon…

Merci Scali.

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Extraits :

Amoureux.
« À l’âge de quatre ans, je suis tombé très amoureux d’une fille de ma classe à l’école maternelle. J’adorais la regarder dans la cour de récréations. Je pensais beaucoup à elle. Je rêvais d’elle chaque nuit. Le jour où j’ai appris que mon état s’appelait “être amoureux”, j’ai dit à ma mère “Maman, je suis amoureux d’une fille à l’école”. Ma mère m’a demandé son prénom et pour la première fois, j’ai dit à voix haute le prénom de celle dont j’étais amoureuse, “Malika !“. Je l’ai dit avec tout l’enthousiasme dont j’étais capable “Malika !”. Je croyais qu’entendre le prénom de cette petite fille déclencherait le même enthousiasme chez ma mère mais elle eut un fou rire nerveux, “Malika ? Et ben… C’est ton père qui va être content”. »

N’importe quoi.
« À table, devant le journal télévisé, mon père exprimait souvent ses opinions politiques. Il commençait par dire “moi si j’étais à la place de tous ces mecs au gouvernement”. En suite de quoi il dévoilait ses mesures pour sauver le pays de la faillite. Par exemple, “je forcerais les grévistes à travailler”. Ou bien, “je bloquerais les importations”. Ou bien encore, “je rendrais obligatoire le travail pour les chômeurs”. Ou bien aussi, “j’interdirais qu’on expose dans les musées des mecs comme Picasso”. »

Le vigile indifférent.
« Je voulais m’acheter un pull en cachemire dans un grand magasin dont l’entrée principale était gardée par un vigile. Je n’ai jamais été réfractaire à ce dispositif de sécurité, aussi quand le vigile m’a demandé d’ouvrir mon sac, je me suis exécuté avec la meilleure volonté du monde. Mais une fois mon sac grand ouvert le vigile n’a pas pris la peine de regarder à l’intérieur. Il m’a fait un vague signe de la main pour m’inviter à entrer dans le magasin. Au lieu d’obtempérer, je lui ai dit “Pardon, mais vous n’avez pas regardé dans mon sac”. Il m’a d’abord gentiment répondu “Oui, c’est bon monsieur, vous pouvez passer”. J’ai donc insisté, “À quoi ça sert de faire ouvrir les sacs si c’est pour ne pas regarder à l’intérieur ?”. Le vigile a commencé à s’impatienter, ”Allez ça va, vous entrez maintenant”. C’est probablement l’injonction impérative qui m’a fait perdre toute mesure. Je me suis entendu lui répondre “Certainement pas ! Je ne vais jamais entrer dans un magasin que vous, Monsieur, vous surveillez ! Faudrait être dingue ! Ça peut péter d’une minute à l’autre, là ! Moi, je me barre ! Je me barre”. Et je suis parti comme un fou, renonçant à mon pull en cachemire. Plus je m’éloignais du grand magasin plus je sentais monter en moi la culpabilité. Pourquoi avais-je été aussi agressif envers ce pauvre vigile ? »

 

 

Scali Delpeyrat est comédien, auteur et metteur en scène.
Il est un ancien élève du Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris.
En parallèle de sa carrière d’acteur, il écrit et met en scène des spectacles et des performances de théâtre, ainsi que des récits.
Avec sa compagnie théâtrale Le bel établissement, il monte et adapte ses textes. Homme de théâtre, mais également de cinéma et de télévision, Scali Delpeyrat est de ces acteurs qui s’invite régulièrement sur nos écrans.
En 2016, il rejoint le casting de la série politique « Baron noir » diffusée sur Canal+. Il tient le rôle de Martin Borde, secrétaire général de la présidence de la République.

« Je ne suis plus inquiet » (2020) est son premier récit littéraire d’auto-fiction publié. Un récit sincère et intime sur sa propre histoire et celle de sa famille.

Nouvelles

Mourir, encore… (et plein d’autres choses)

de Nick Gardel
Broché – 21 août 2018
Éditeur : Independently published

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Le temps qui passe, l’écriture, l’amitié et la mort. Voici un quatuor imprévisible. Vingt nouvelles pour en faire le tour. Vingt textes pour en disséquer les recoins. Du polar, du thriller, du fantastique, de la dérision, mais toujours un seul but : raconter. Raconter combien il est difficile de sortir indemne de ce monde tumultueux. Raconter que, parfois, la seule solution est d’en mourir, encore…

 

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Bonjour à toutes et à tous,

Celles et ceux qui me connaissent un peu savent que j’adore lire… Et je lis de tout !

Mais, temps en temps, je fait un petit “break”, et je lis des nouvelles. Ce format d’écriture souvent plus rythmé oblige les auteurs à aller droit au but, et dans le fond, et dans la forme. Ici, l’erreur ne pardonne pas !

Mon “Ressenti” forcément est différent. Il n’y a pas ici de “ligne de conduite”. L’auteur aborde dans ces 20 histoires courtes des thèmes tellement différents qui me serait impossible d’en développer un pour chaque intrigue…

Nick Gardel maitrise son sujet, et il le fait plutôt très bien.
Chaque nouvelle a son univers bien particulier. Folie, philosophie, violence, amour aussi… Je me suis régalé de passer ainsi d’une vie à l’autre, d’un sujet sombre à un autre plus léger. J’ai été ému, triste, mais j’ai ri aussi, tout seul dans mon fauteuil devant la cheminée avant de grincer des dents sur la nouvelle suivante.

Nick est un vrai écrivain. Un amoureux des mots. Je l’ai, plusieurs fois dans ma lecture, imaginé derrière son bureau se triturant l’esprit. Chaque idée, chaque mot trouve automatiquement sa place. Lorsqu’il écrit, il jongle, il jubile, il vie. Il vous emmènera à chaque fois là où il le voudra, et si vous êtes comme moi, alors, vous en redemanderez toujours plus… Mais, vous n’aurez plus qu’a vous laisser guider dans son monde à travers ses récits.

Encore Nick, Encore…

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Extraits :

« Moi j’aime les polars. Deux bouquins par semaine, c’est ma moyenne. Et puis, il y a tellement de livres, tellement d’histoires. C’est comme la vie, on n’en voit pas le bout. »
…/…
« Je n’écris que des nouvelles.
L’intensité de l’effet produit sur le lecteur, le fait de ne faire qu’effleurer sans pour autant diminuer les personnages, les richesses que l’on peut puiser à bouleverser un agencement en quelques phrases, tout cela semble fait pour moi. Je veux dire par là que je ressent intensément est profondément une adéquation avec la forme même de ce type de littérature. Je n’écris que des nouvelles, précisai-je. En fait, je ne sais écrire que des nouvelles. Ce qui rejoint la première partie de mon explication, car, malheureusement, les nouvelles sont parfaitement invendables de nos jours. »

 

 

Rattrapé par une quarantaine qui ne va en s’arrangeant, il a bien fallu que Nicolas JUAN trouve une échappatoire. Il a finalement mis la main sur Nick Gardel pour se cacher derrière et pouvoir écrire des bêtises.

Après avoir exercé différents petits boulots, Nick Gardel intègre l’Éducation nationale. Il s’y occupe d’ados désocialisés et déscolarisés qu’il a pour délicate mission de ramener dans un chemin plus… droit.

Émotion, Noir

Mamie Luger

Benoît Philippon (Auteur)
Broché – 9 mai 2018
Éditeur : Les Arènes

Six heures du matin, Berthe, cent deux ans, canarde l’escouade de flics qui a pris d’assaut sa chaumière auvergnate. Huit heures, l’inspecteur Ventura entame la garde à vue la plus ahurissante de sa carrière. La grand-mère au Luger passe aux aveux et le récit de sa vie est un feu d’artifice. Il y est question de meurtriers en cavale, de veuve noire et de nazi enterré dans sa cave. Alors aveux, confession ou règlement de comptes ? Ventura ne sait pas à quel jeu de dupes joue la vieille édentée mais il sent qu’il va falloir creuser. Et pas qu’un peu.

 

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Bonjour à toutes et à tous…

Une fois n’est pas coutume, mais pour la première fois ce n’est pas vous qui avez eu la primeur de “Mon Ressenti” !
En effet, dès la fin de ma lecture, encore baigné de l’émotion que j’avais en moi, j’ai tout de suite contacté Benoît Philippon.

“Bonjour Benoît,
On peut dire que tu m’auras bien eu !!!

Hier soir, après une longue série de lectures fortes en émotions, je me suis dit qu’il était temps de « passer » à Mamie Luger, pour m’aérer un peu la tête !
Et, dès la première page mon premier sourire est arrivé, très vite rejoint par beaucoup d’autres et même certains éclats de rire, carrément !!!
Mais, ce que je n’ai pas tout de suite senti venir, ce sont les émotions, qui petit à petit, m’ont imprégné, puis étouffé me tirant des larmes des yeux…
Quel bonheur de lecture.

Un roman qui se voulait « léger », mais très poignant finalement…
Je voulais juste te dire merci.
Merci pour ces quelques heures passées avec Berthe (le prénom de ma grand-mère !), sacré personnage qui va me manquer !

Que vivent encore longtemps les livres comme le tien !

Je t’embrasse.
Prends bien soin de toi et des tiens…”

Alors oui, j’ai ri et j’ai pleuré.
Oui, j’ai adoré cette grand-mère hors du commun. Son franc parler, son coté direct du haut de ses 102 ans…
Cette histoire m’a pris aux tripes, et les a retournées.

Berthe a vécu toute sa vie à la recherche de l’amour.
Et un jour elle l’a trouvé…
De son premier mari, qu’elle choisi malgré les conseils de Nana, sa grand-mère, en passant par l’indicible et l’innommable, Berthe profite d’une garde à vue pour nous confier tout son vécu.

Sommes-nous ici vraiment dans un Policier ?
Je ne sais pas, mais qu’importe…
C’est un roman qui relate de thèmes graves de la vie, avec humour, mais pas que, “tout simplement” !

C’est très beau. Je recommande vivement !

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Extraits :

« Merde, que ce garçon était laid, se disait Berthe en préparant la soupe, mais qu’est ce qu’il dégageait ! On aurait dit un Minotaure. Elle épluchait les carottes, aidée par la jolie jeune fille au sourire en forme de soleil. Ces deux mignons déversaient des torrents d’amour, elle devait s’accrocher à sa cuisinière pour ne pas être emportée. L’énergie qui liait ses deux là, Berthe l’avait bien connue. Dans le temps. Les observer s’échanger des œillades au milieu de sa cuisine lui a rappelé ce qu’elle avait perdu, mais elle était heureuse pour eux. Ils avaient la chance de vivre un amour mythologique. Elle avait vécu le sien, elle goûtait le leur, même pour un soir, et cette sensation lui faisait du bien. »

« – Berthe ?
– Oui ?
– Vous venez d’avouer un meurtre, là.
– Et ?
– Et c’était pas un nazi, celui-là.
– Donc ?
– Eh bien, c’est grave.
– Pourquoi ?
– C’est hors-la-loi, Berthe. Encore la loi.
Ventura brandit l’étendard de l’évidence avec une indéfectibilité remarquable.

– Oh, c’est bon, y a prescription, non ?
Le boomerang du droit pénal, revient en pleine gueule de l’inspecteur.
– Dans ce cas précis, effectivement. Seulement je vous rappelle que vous avez tiré sur votre voisin ce matin, en plus de mes troupes. Même s’il est encore vivant celui-là, les magistrats pourraient qualifier votre comportement de dangereux pour la société… »

 

 

Né en 1976, Benoît Philippon grandit en Côte d’Ivoire, aux Antilles, puis entre la France et le Canada. Il devient scénariste puis réalisateur pour le cinéma. Après Cabossé publié dans la Série Noire, Mamie Luger est son deuxième roman noir, suivi de Les Arènes en 2020.

Émotion, Humour, Philosophique

Une bouche sans personne

de Gilles Marchand (Auteur)
Broché – 5 octobre 2017
Éditeur : Points

De sa lèvre inférieure au tréfonds de sa chemise, il a une cicatrice qu’il dissimule sous une écharpe. Le jour, il compte et recompte des colonnes de chiffres. La nuit, il retrouve Sam, Thomas et Lisa au café. Ses trois amis ne savent rien de lui. Un soir, il décide d’ôter le cadenas de son armoire à souvenirs. Et de raconter avec fantaisie l’empreinte que l’Histoire a laissée sur son corps…

“ On se laisse prendre au jeu de l’imaginaire délirant du narrateur qui cache un traumatisme douloureux, et on finit par rêver avec lui.  »
20 minutes

 

2020_027_Marchand Gilles - Une bouche sans personne.jpg

 

Bonjour à toutes et à tous.

Une bouche sans personne, est le premier roman de Gilles Marchand.
Pas le premier que je lis, mais l’un de ceux dont j’avais entendu beaucoup de bien…
Dès les premières lignes, je retrouve le style de Gilles, complètement farfelu, déjanté, mais très profond aussi, tout en étant émaillé d’inventions.

Un comptable se cache la journée au milieu de ses chiffres. Il ne vit qu’à travers ses chiffres, ses nombres qui ne l’ont jamais trahi. Il est plus facile de faire des additions que de parler à des personnes. Lorsque l’on compte, on n’est pas obligé de parler.
Mais, quand le bureau ferme, il est seul et cogite. Pas simple de passer inaperçu avec pareille cicatrice. Alors depuis dix ans, le soir venu, il va dans un bar retrouver ses amis, son visage protégé d’une écharpe qu’il n’hôte jamais. Personne ne sait rien de son passé.

Pourtant, un soir, il va de se dévoiler.
L’homme commence alors à raconter… Sa vie, son grand père Pierre-Jean…
Léger et aérien en apparence, le récit devient le roman d’un homme qui se souvient et survit aux traumatismes d’une vie.

Gilles nous offre ici un roman sur l’amitié, et la solitude. Il jongle admirablement bien avec les ingrédients de la vie créant un roman à la fois léger et profond, humain, et habilement construit, serti d’une écriture poétique, douce et pleine de fantaisie.

Nous ne connaîtrons jamais ni le nom, ni le prénom du narrateur traité à la première personne du singulier.
Mais est-ce bien indispensable ?
N’est-ce pas un outil supplémentaire que nous donne l’auteur afin de plonger avec lui dans son monde ?

Vous l’aurez compris j’ai beaucoup aimé ce livre !
Magique, fort, et puissant, l’âme de Boris Vian vient parfois se glisser entre certains mots entraînant un mélange de belle écriture et de métaphores justement dosées…

La fin du roman, m’a bluffé et donne à l’ensemble du récit tout son sens, qui sort des sentiers battus. Un premier roman attachant où vaincre l’horreur est une affaire de mots autant qu’une affaire de cœur.
Que c’est bon de lire un livre tout simplement bien écrit, précis et rempli d’humanité.
Je ne peux que vous recommander ce livre.

 

Hier,

Hier, tous mes problèmes me paraissaient si loin
Aujourd’hui, on dirait qu’ils sont là dans le but de perdurer
Oh, je crois en hier

Soudainement, je ne suis pas la moitié de l’homme que j’étais
Il y a une ombre suspendue au-dessus de moi
Oh, hier est venu soudainement

Pourquoi devait-elle partir, je ne sais pas, elle ne l’a pas expliqué
J’ai dit quelque chose de mal, maintenant hier me manque

Hier, l’amour était un jeu tellement facile à jouer
Aujourd’hui j’ai besoin d’un lieu pour m’isoler
Oh, je crois en hier

 
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Extrait :

« Pourquoi n’enlèves-tu pas cette foutue écharpe ? »
Silence. Il continue à me regarder dans les yeux tandis que Sam s’efforce de prendre un air dégagé. Ce n’est pas la première fois qu’ils m’interrogent à ce sujet. Depuis le premier jour, ils me disent que je peux la retirer. « Il fait trop chaud dedans », « Tu auras froid en sortant », « On est entre amis, tu n’as rien à craindre »… Ils sont revenu plusieurs fois à la charge sans trop insister et finissant par s’excuser de se mêler de ce qui ne les regarde pas. Je n’ai jamais cédé. Il n’y a pas de négociation possible, parce que je n’ai rien à y gagner. Et on ne négocie pas avec les amis.
Pourtant, ce soir c’est différent. Il y a autre chose. Pas de la pitié, mais quelque chose qui flotte dans l’air, entre le comptoir, la réserve, notre table et la porte d’entrée. Quelque chose qui joue avec la fumée de nos cigarettes, qui voile leurs regards et fait vibrer leurs voix d’un timbre que je ne parviens pas à identifier. J’ai bien envie de leur demander ce qui se passe, optant pour la formule la plus efficace en ces circonstances :
« Qu’est-ce qui se passe ?
– Rien, pourquoi ?
– Mais si, je le sens bien. Il y a comme une odeur. Vous savez, ces odeurs décrites dans certains livres, ces odeurs indéfinissables dont on ne sait jamais si elles existent ou s’il s’agit de simples figures de style, comme celle de la peur de l’argent. Un truc qui passe et que je n’arrive pas saisir.
– Une odeur errante ? » Sam est mal à l’aise et commence à remuer sur sa chaise.
« Vu la description, je dirais plutôt rôdante, ajoute Thomas. »

 

 

Gilles Marchand est né en 1976 à Bordeaux.

Il a notamment écrit Dans l’attente d’une réponse favorable (24 lettres de motivation) et coécrit Le Roman de Bolaño avec Éric Bonnargent.
Son premier roman solo, Une bouche sans personne en 2016, attire l’attention des libraires (il est notamment sélectionné parmi les « Talents à suivre » par les libraires de Cultura, finaliste du prix Hors Concours, et remporte le prix des libraires indépendants « Libr’à Nous » en 2017) et de la presse, en proposant le curieux récit, le soir dans un café, d’un comptable le jour expliquant à ses amis pourquoi il porte en permanence une écharpe pour cacher une certaine cicatrice.

Il a été batteur dans plusieurs groupes de rock et a écrit des paroles de chansons.

Humour

“Paris-Venise” de Florent Oiseau

Paris-Venise
de Florent Oiseau (Auteur)
Poche – 17 janvier 2019
Éditeur : Pocket

Une bonne pâte, ce Roman. Une bonne tête. Un peu mou, mais honnête, comme le bon pain. Pas étonnant qu’il déniche ce boulot idéal : garçon de cabine dans le Paris-Venise – train-couchettes. De quoi redonner le sourire à Mlle Pajot, sa banquière. Et à lui le goût du voyage. Car il s’en passe, la nuit, dans ce monde en perpétuel mouvement : les objets perdus qu’on empoche, les clandestins qu’on planque moyennant finances, les combines en loucedé… C’est qu’il en faut, de l’argent, quand on est amoureux et qu’on roule vers Venise. Et Roman est amoureux…

 » L’écriture dans le sang et la vanne au bord des lèvres.  » Sophie Delassein – L’Obs

 » Il devient ardu de savoir quoi acheter en librairie pour lire tout en riant à gorge déployée. Florent Oiseau pourrait bien être la solution.  » Nicolas Ungemuth – Le Figaro Magazine

 » L’humour le dispute à l’ironie au gré de chaque voyage.  » L’Express

2019_009_Florent Oiseau - Paris-Venise

Bonjour à toutes et à tous…

Les gens dernièrement ont tendance à me donner des conseils de lecture. Pas facile de leur dire que j’ai une PAL de plus de 400 romans qui grandit chaque jour. (9 encore hier…) Alors, lorsque Samantha de la fnac Rosny 2 m’a conseillé gentiment celui-ci, dont elle m’avait déjà parlé quelques semaines plus tôt, j’ai été bien avisé de l’écouter et tant pis pour ma PAL !!!

Une histoire qui aurait pu être banale, une histoire qui aurait du être banale. Si je n’avais très vite ressenti la sincérité de l’auteur, voire peut-être d’un certain vécu ? Le style narratif, en fait une histoire qui m’a donné envie de lire “ce petit” livre d’une seule traite.

Paris-Venise de Florent Oiseau m’a agréablement surpris.
Dès la première page, Florent, s’attache à décrire avec humour, simplicité et conviction la difficulté des « petits boulots » et le quotidien de certains travailleurs. L’auteur utilise à bon escient l’humour et cela fonctionne parfaitement. La justesse des personnages aussi. La simplicité de leur quotidien, leurs difficultés à se trouver une place dans la vie.

Avec un thème original et profond, j’ai suivi avec plaisirs les tribulations de Roman, banlieusard un peu paumé qui n’a toujours rien fait de sa vie, dans un univers un peu surréaliste, avant de travailler dans le train de nuit qui relie Paris à Venise.

Je conseille ce voyage agréable et divertissant…

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Extrait :
« – Les taxis à Prague, ils roulent comme des dingues.
– Ah bon ?
– Ouais, des furieux, les gars.
– Et c’est beau, Prague ?
– En sait rien. Jamais allé.

Didier, il savait des trucs. Il ne disait pas toujours d’où il les savait, mais le gars maîtrisait ses sujets. Une pointure, selon ses dires.
Didier, ce n’était pas la peine de lui parler de poissons, il en avait forcément chopé un plus lourd que toi. si tu évoquais le moteur de ta bagnole, c’était pareil, le siens faisait le double au bas mot. Avec lui, c’était tout le temps la même histoire. Mais en réalité, la seule chose que Didier avait de plus gros que les autres, c’était sa femme Shirley »

 

Florent Oiseau a 28 ans. Il a été pompiste, chômeur, barman, plongeur, réceptionniste de nuit, ouvrier dans une usine de pain, crêpier et couchettiste sur le Paris-Venise. Son premier roman, Je vais m’y mettre (Allary Éditions, 2016), a été salué par les critiques et désigné
 » le livre le plus drôle de l’année « .